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Homélies - Page 39

  • Disciples du Seigneur ?

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    Comment allons-nous être des disciples du Seigneur ? Permettez que je revienne sur cette question qui nous occupe depuis 2 jours. Commet allons être des disciples du Seigneur nous dans les jours, les années qui nous sont à vivre, à commencer par aujourd’hui même ? Qu’est-ce qui va nous aider à vivre de cette vie de la présence discrète mais joyeuse du Christ ressuscité ? Comment la présence de l’Esprit Saint va-t-elle nous aider à traverser les hauts et les bas de nos vies, les moments pleins et les moments vides ?

     Vous ne serez pas surpris si je commence par les fausses réponses, les pièges, ou les vraies fausses solutions. Ou plutôt ce qui n’est pas opportun.

    Une première solution est de penser que le milieu ambiant, la société contemporaine va nous aider à traverser tout cela sans trop se poser de questions. Evidemment, au moment même où je le dis, vous réalisez que ce n’est pas possible. Et pourquoi non ? Nous sommes à un moment de l’histoire de nos sociétés où les valeurs même de nos sociétés ont pris la tangence. La foi a été congédiée de l’espace public. Comme St Augustin au début du Vème siècle, nous voyons un monde qui s’effondre. Ne cherchez pas. Il n’y pas d’invasions de barbares. Alaric n’est pas entré dans Rome. Non, l’indifférence est globale. Le droit et la législation s’éloignent de tout ce qui était connu jusqu’alors. On ne devient pas disciple en baptisant la société et les institutions. On devient disciple en exigeant l’héroïsme et la sainteté que de soi-même.

    Une deuxième solution, assez proche de la première, est de se reposer sur les autres. La foi reçue et vécue en famille, les groupes, les réseaux auxquels nous appartenons, la communauté qui nous accueille,… peuvent êtres des nids douillets pour faire notre trou et devenir des disciples du Christ. Home sweet homme. C’est confortable, mais on ne vit pas sa condition de disciple en donnant sa procuration aux autres. Et pourquoi non ? Parce que le Christ attend de nous, de moi, de toi une réponse et un engagement personnel. C’est de toi dont il s’agit. C’est de ton bonheur, de ta joie, de ta vie. C’est une question cruciale qui te concerne. Ne la laisse pas aux autres. Le Christ, l’Eglise, et peut-être même la société attend ta réponse brûlante à la proposition toute simple qui t’es faite : veux-tu être ami avec moi ? Ami au point de laisser cet ami, ce maître tenir le gouvernail de ta vie.

    Alors comment allons-nous être des disciples du Seigneur ? Vous avez remarqué que je n’ai pas encore répondu à la question. Les lectures de ce jour vont nous y aider. 3 points et j’en termine.

    1. « Qu’ils soient un » dit le Christ dans sa prière au Père à Gethsémani. Nous ne sommes pas seuls dans la foi. Les autres nous sont donnés comme des frères et des sœurs que nous n’avons pas choisis. Regardons nous ici ce matin. Sans le Christ nous n’aurions pas beaucoup de raisons humaines d’être ensemble, à une heure si matinale pour un dimanche matin, dans un lieu si loin de nos bases pour beaucoup, d’âge différents, de langues différentes, de cultures différentes, d’états de vie différents. Dans la foi, ce qui nous unit est une grâce inouïe, parce que c’est un cadeau qui nous vient de Dieu, et dont aucune sociologie ne peut rendre compte. Ce cadeau est une onction, un parfum, c’est une grâce qui est gratuite.

    2. « Le monde ne t’a pas connu » dit également le Christ à son Père. Et de fait, et c’est bien pour cela que le Christ a été mis à mort, sinon, il sera mort au fond de son lit entouré de ses disciples à la fin d’une vie bien remplie. Mais nous ne cultivons pas l’idée de penser que croire sera plus facile quand tous partageront notre foi. Nous ne cultivons pas l’idée de penser que cela sera plus confortable quand il n’y aura plus ni doutes, ni oppositions, ni questions. Bref, nous ne ferons pas porter aux autres l’exigence de notre acte de foi. Avec courage (mais nous n’en manquons pas, n’est-ce pas ?), avec douceur (mais, nous n’en manquons pas, n’est-ce pas ?), avec exigence avec nous, et miséricorde envers les autres, nous allons cheminer dans ce lent pèlerinage de notre vie où le Christ nous accompagne puisqu’il l’a promis, et où l’Esprit Saint nous habite puisqu’il nous a été donné

    3. « Les yeux levés, il priait », dit St Jean à propos du Christ. La relation du Christ à son Père est unique, et pour cause. Nous serons des disciples si nous entrons dans cette relation. Concrètement ? Il s’agit de laisser notre vie s’aérer en intégrant cette dimension de la prière, c’est à ire la mise en œuvre et en parole de notre relation au Père. Concrètement et sans se raconter d’histoire. Nous serons des disciples, quand cette prière nous fera mettre à genoux jusqu’aux larmes pour demander pardon ; quand elle nous fera lever les mains pour remercier ; quand elle nous fera joindre les mains jusqu’aux crampes pour demander, supplier et intercéder.

    Quand commencerons nous à être des disciples ? C’est maintenant.

  • Tandis qu’il les bénissait, il se sépara d’eux et fut emporté au ciel

    chris22.jpgTransportons nous ce matin au Mont des Oliviers, entre Jérusalem et Béthanie. Avec les apôtres, suivons Jésus une dernière fois au terme de ces 40 jours de temps pascal, pour être avec eux dans cet évènement de l’Ascension du Seigneur. Que peut-il y avoir dans leurs cœurs au moment où ils voient le Christ disparaître à leurs yeux, au moment où on pourrait les penser orphelins, au moment où le Christ les laissent seuls ?

    L’Evangile répond à cette question de façon précise : ils sont remplis de joie. Notre psychologie contemporaine est un peu bousculée : comment pourraient-ils être en joie à ce moment où il leur faut faire le deuil de la présence du ressuscité ? Et L’Evangile insiste, ils étaient sans cesse dans le Temple à bénir Dieu.

    Louange, bénédiction, joie. Voilà donc la tonalité de ce jour et de cette fête, tonalité qui doit contraster avec le sentiment de l’absence, de la disparition du Christ, de son Corps ressuscité. Scrutons et mettons nous au diapason de ces motifs de joie en ce jour. En voici deux et un troisième.

    La joie de la présence. « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps » dit-il dans l’Evangile selon saint Matthieu. Dans le corps physique de Jésus de Nazareth, dans le corps glorieux du Ressuscité, dans le Corps mystique de l’Eglise, dans le corps sacramentel de l’Eucharistie, sa présence est source de joie. Ces modes de présence nous déconcertent parce qu’ils touchent différemment notre sensibilité humaine de chair et de sang. Evidemment  nous serions prêt à courir si l’on nous disait « il est ici ! » ou « il est là ! ». La joie n’appartiendrait alors qu’à son retour dans la gloire. L’Eglise ne serait qu’en deuil en attente éplorée de la fin des temps. Déjà avec la scène des disciples d’Emmaüs, nous voici prévenus, toute trace de sa présence est source de joie. Il s’agit donc de discerner ces traces, ces signes. Et le sacrement vient au secours de notre cécité, de nos aveuglements. On nous dit qu’il est là. Il s’agit de le croire, pour notre joie.

    La joie de sa promesse. Le Christ disparaît des yeux des apôtres en assurant qu’ils recevront la force d’en haut. La force d’en-haut, pas celle de la guerre des étoiles avec son côté obscur ou son côté lumineux, mais la présence personnelle de l’Esprit Saint. Pour tout Juif contemporain du Chris, mais pour tout disciple du Christ, Dieu est une promesse. Promesse de vie, promesse joie, promesse de bonheur, promesse d’un chemin de béatitudes. Cette promesse est une joie, parce qu’il y a une joie inouïe à entrer dans l’espérance que cette promesse se réalisera. Et regardez bien dans la suite du texte, comme dans le début du livre des Actes des Apôtres comment l’attente de l’esprit Saint, dans cette neuvaine qui les sépare de la Pentecôte, est assortie d’une joie indicible. Joie de la prière au Temple, joie de se rassembler au Cénacle autour de marie, joie d’agréger Matthias au groupe des Douze.

    Joie, joie, joie disait le philosophe Pascal au cœur de la nuit du 23 novembre 1653 où il avait reçu la grâce de cette illumination du cœur qui l’avait embrasé pour tout le reste de sa vie. Il ne s’effraye pas que cette illumination ne dure qu’une nuit. Toute sa vie va être vécue dans le prolongement de cet embrasement du cœur, promesse d’une union encore plus grande, et qui reste à venir.

    La joie de la présence et la joie de la promesse. Voici les 2 motifs de joie qui nous sont proposés en ce jour. Nous n’en avons pas d’autres, mais ces 2 nous sont donnés comme nourriture pour le chemin de notre foi, comme gage de notre espérance. Dans la préface de ce jour, le prêtre chantera « le Seigneur Jésus, vainqueur du péché et de la mort [qui] est aujourd’hui ce Roi de gloire devant qui s’émerveillent les anges. Il s’élève au plus haut des cieux, pour être le Juge du monde et le Seigneur des seigneurs, seul médiateur entre Dieu et les hommes ; il ne s’évade pas de notre condition humaine, mais en entrant le première dans le Royaume, il donne aux membres de son corps l’espérance de le rejoindre un jour ».

    Joie sur terre à cause de la présence et de celle de la promesse. Mais aussi joie au ciel, parce que les anges s’émerveillent de ce que l’humanité du Christ entre dans la gloire du ciel, en attendant que les membres de son corps le rejoignent un jour. Joie, joie, joie. Ne soyons pas chiches. Entrons dans cette joie du ciel, et cette joie de la terre.

  • Les uns les autres

    IconSteTriniteRoublev_Diapo.jpg« Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres ». Jn 13,35

    Pour être bien sûrs que nous ayons compris l’enseignement du Christ, la liturgie nous le fait réentendre ce 5ème dimanche de Pâques. Aimer Dieu, et aimer son prochain comme soi-même, voilà le cœur de la foi, le noyau irréductible de ce qui fait l’identité chrétienne. La citation de ce jour prend place après le lavement des pieds, après que le Christ se soit expliqué sur le sens de ce geste, après qu’il ait annoncé la trahison d’un des apôtres, après que Judas ait interrogé « serait- moi ? », et finalement après qu’il soit sorti.

    C’est que ce groupe des Apôtres, cette Eglise naissante est tout sauf un groupe de bons amis. Il n’y a pas beaucoup de raisons humaines qu’il soit ensemble. Des pharisiens et des publicains, des pécheurs et un collecteur d’impôts, des juifs de langue araméenne, et d’autre de langue grecque. Un groupe de disciples du Seigneur, certes, mais qui n’est réunit pour aucune raison humaine. Seule le Christ les réunit. Et il en est ainsi de l’Eglise. Seule la charité du Christ nous réunit. D’où l’insistance du commandement du Seigneur, au long de son ministère public, et encore plus aux heures brûlantes de la Passion, au soir du lavement des pieds.

    « Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres ». Les uns les autres. Retenons bien cette expression. Belle expression de réciprocité, de circularité, comme l’amour qui circule et s’échange entre les personnes de la Trinité. Les uns les autres. Dans les écrits du Nouveau Testament, spécialement dans les lettres de St Paul, l’expression se fait encouragement, exhortation même, appel vibrant à l’unité et à la charité dans les communautés chrétiennes qu’il a fondées.

    De façon très positive, comme un encouragement : « Accueillez-vous les uns les autres » (Rm 15,7), « Exercez l'hospitalité les uns envers les autres » (1 P 4,9), « Soyez pleins d'affection les uns pour les autres » (Rm 12,10), « Ayez soin les uns des autres » (Ep 4,32).

    De façon plus sévère, parce que ces chrétiens ont besoin d’être repris : « Ne vous jugez pas les uns les autres » (Rm 14,13), « Ne parlez point mal les uns des autres » (Jc 4,11), « Ne mentez pas les uns aux autres » (Col 3,9), « Ne vous provoquez pas les uns les autres » (Ga 5,26), « Ne vous enviez pas les uns les autres » (Ga 5,26)

    Enfin de façon exigeante : « Pardonnez-vous les uns les autres » (Ep 4,32), « Portez les fardeaux les uns des autres » (Ga 6,2), « Supportez-vous les uns les autres » (Ep 4,2), « Édifiez-vous les uns les autres » (1 Th 5,11)

    La vie commune dans la maison Eglise est exigeante, si l’on entend la leçon des premiers disciples du Christ. Parce que l’amour mutuel, la charité nous pousse à sortir de notre singularité, pour tout convertir en nous, jusqu’à nos relations interpersonnelles. Le commandement de l’amour fraternel, de la charité belle et dense envers nos prochains, est le test ultime de notre vie de foi. Nul ne peut penser en être dispensé. Nul ne peut penser être arrivé.

    Dans les célébrations de mariage, il arrive souvent que les fiancés choisissent le très bel hymne à la charité de St Paul, qui est, à sa manière, une belle présentation de cette charité à l’œuvre dans l’amour humain. Reste à le mettre en œuvre, avec son exigence quotidienne. Humblement, jour après jour, reprendre les moyens simples et les chemins que ceux que les apôtres ont eux-mêmes arpentés.

    Une question : pourquoi cet effort ? Une réponse simple. Parce que le Christ nous le demande. Si cela ne vous suffit pas, relisons l’Evangile de ce dimanche. C’est pour le témoignage de notre foi au Christ. « Ce qui montrera à tous les hommes que vous êtes mes disciples, c’est l’amour que vous aurez les uns pour les autres ». Certains non croyants de nos familles, de nos amis, de nos quartiers sont choqués de voir que les croyants ne sont pas meilleurs que les autres. En un sens, c’est compréhensible. Mais surtout ils sont choqués, que les disciples de Jésus ne fassent pas plus d’effort. La manière de vivre nos relations humaines, en couple, en famille, dans les groupes d’amis, dans une communauté paroissiale, ou d’autres réalités ecclésiales, sont un contre-témoignage au Christ. Nos murmures, nos mensonges, nos divisions, nos refus d’accueillir, discréditent les beaux discours que nous avons aux lèvres. Je le dis également pour moi-même.

    Loin de nous accabler, il s’agit d’entendre cet encouragement fort du Christ en ce jour. De le réentendre, et d’en reprendre le chemin. Bon courage.

  • Vous m’appelez Maître et Seigneur

    Lavement+des+pieds+Arcabas.jpgC’est ce que dit Jésus à ses disciples au moment si inédit de ce geste du lavement des pieds. Lui le Maître et le Seigneur, lui le Fils de Dieu s’abaisse, se fait esclave, serviteur. Pierre ne comprend pas, pas tout de suite, tout comme lui et la plupart des disciples ne comprennent pas qu’il lui faille être arrêté, souffrir, mourir avant de ressusciter d’entre les morts. Comment le Maître et le Seigneur serait-il serviteur ? Comment serait-il souffrant ?

    Gardons pour ce soir ce visage et ce geste de Jésus. Il est le Serviteur, celui qui au milieu de nous au met au service. . Il est le Serviteur du Père. Par amour, il est le serviteur des hommes. Au service de l’humanité, au service de son bonheur et de sa communion avec le Père, au service singulier de chacun de nous. On peut saisir ce service de Jésus par 2 regards complémentaires.

    Le premier regard est celui du service auquel nous sommes tous appelés. Le baptême et la confirmation nous ont faits devenir des disciples de Jésus au point même d’être en quelque sorte conformés à lui. Avec lui, comme lui, en lui, nous sommes appelés à annoncer la Bonne nouvelle qu’il est ; nous célébrons le mystère de cette communion avec le Père ; nous nous mettons au service des autres. Au milieu de nous, les diacres manifestent cette mise en service de l’Eglise, partout où elle est présente. C’est bon de nous en souvenir en cette année où toute l’Eglise de France se met à l’écoute de l’Evangile pour discerner cet appel au service, à la diaconie de l’Eglise. La question se posera donc. A qui lavons-nous les pieds ? Concrètement ou symboliquement. Devant qui nous abaissons nous pour nous mettre à son service. Dans nos familles, dans les couples, dans nos quartiers, dans nos cercles amicaux, dans nos milieux professionnels, nous serons reconnus comme disciples du Christ, si nous nous mettons u peu plus au service. Non sans discernement, non sans prudence à certains moments, mais quand même, il conviendra de s’abaisser, pour manifester que le Christ s’abaisse pour livrer sa vie.

    Mais il y a un autre regard, complémentaire, et même plus que complémentaire, qui fonde le premier. Le Jeudi Saint est la fête des prêtres, parce que c’est la fête de l’institution du sacerdoce. Et justement, ce geste du lavement des pieds, le Christ le donne à ses disciples, aux Douze, en leur demandant de le réitérer, comme pour l’Eucharistie. Il fonde leur autorité sur le service, comme pour lui-même, sur la disposition profonde d’être tout à tous, parce qu’ils sont tout à Lui, tout à Dieu. Aimer, c’est tout donner et se donner soi-même. Au milieu de vous, pour vous, face à vous, les prêtres sont le rappel constant que l’Eglise est fondée sur l’unique service du Christ. Par le sacrement de l’Ordre, les prêtres sont un prolongement de cette unique charité pastorale du Christ qui s’abaisse jusqu’à la mort et la mort de la Croix.

    Les prêtres, vos prêtres seront vos serviteurs, sacrement de cette charité du Christ Tête et Pasteur, si 3 aspects se vérifient.

    Ils sont les serviteurs de la parole de Dieu pour vous. Serviteurs d’une Parole autre et qui altère. Serviteurs d’une parole qu’ils n’ont pas produite eux-mêmes, dont ils ne sont pas la source. Ils la reçoivent, elle passe en elle et il la sème en vous, pour qu’elle porte du grain, cent pour un, soixante pour un, trente pour un. Au besoin, ils dépierrent le chemin, ils enlèvent les ronces qui étouffent, ils chassent les oiseaux qui picorent le grain. Soyez assurés, et demandez-leur, qu’ils conforment eux-mêmes leur propre vie à cette Parole qui altère et vivifie.

    Ils sont les serviteurs de votre amitié avec le Christ. Par les sacrements, par la Parole, par le service, ils sont les serviteurs de la grâce en vous et pour vous. Comme Jean-Baptiste, ils sont l’ami de l’Epoux et se réjouissent d’entendre sa voix. Comme Pierre, ils n’ont ni or, ni argent à offrir, mais la grâce agissante du Christ pour vos vies, telles qu’elles sont. Comme tant et tant de prêtres qui les ont précédés, ils consolent, relèvent, fortifient tous ceux qui souffrent et qui peinent. S’ils vous paraissent à certains moments exigeants, c’est pour mieux vous aider à entrer plus personnellement et plus ecclésialement dans cette belle relation d’amitié avec le Christ. Et s’ils vous paraissent exigeants, c’est aussi parce qu’ils veulent m’être pour eux-mêmes.

    Ils sont les serviteurs de votre joie. La joie de Dieu qui veut se lire sur vos visages, et surtout dans vos cœurs, même et surtout quand les raisons humaines d’être joyeux sont dissipées ou se sont envolées. Serviteurs de votre joie, parce qu’ils sont d’abord les serviteurs de la joie de Dieu, celle qu’il a en voyant des hommes et des femmes désirer et choisir la communion avec Lui. Celle que Dieu a quand il veut demeurer en vous et vous en Lui.  Peut-être sont-ils maladroits, peut-être ne sont ils pas naturellement enclins à la joie, peut-être sont-ils fatigués à certains moments, et pourtant, toujours, ils veulent être les serviteurs de votre joie. Qu’elle soit pleine et parfaite.

    Alors, nous comprendrons ce soir, que ces serviteurs sont entièrement conformés, jusque dans leur vie, au seul Maître et Seigneur, au Christ Tête et Pasteur, à celui qui est venu non pour servir, mais pour être servi. Alors nous comprenons le geste du lavement des pieds. Pas seulement les pieds Seigneur, mais aussi la tête. Viens nous baigner de ta charité !

  • Vivre, c'est changer

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    C’est notre cher cardinal Newman, l’oratorien de Birmingham qui dit cela. Vivre c’est changer. Après un parcours de Carême où nous avons reçu différentes figures pour nous aider à avancer sur ce chemin de la conversion, le chemin du changement intérieur, nous voici avec cette femme, la femme adultère.

    Abraham, le sédentaire apatride et sans enfant s’était mis en route vers une terre et une descendante promises. Pour lui, changer, ce fut de donner sa foi en Dieu. Pour Moïse, ce fut de conduire le peuple à travers l’épreuve du désert. Pour le fils prodigue, ce fut ce retour sur lui-même et ce chemin de retour vers la maison du Père. Et voici ce dimanche cette femme qui ne demande rien, qui arrive devant Jésus pas tellement pour être accusée, mais plutôt pour être l’instrument d’une condamnation qui la dépasse : celle de Jésus par les scribes et les pharisiens. Elle ne dit presque rien. Elle est témoin de quelque chose qui la dépasse complètement, et pourtant, une phrase de Jésus, cette phrase finale que nous connaissons par cœur : « Va et désormais, ne pèche plus ».

    Pour elle, et en cette instant précis, vivre c’est vraiment changer. Et le changement en cet instant précis, c’est une vie redonnée, une beauté renouvelée, un chemin qui se réouvre dans une existence comme arrêtée, figée, tétanisée par cet enfermement.

    Les autres lectures de ce jour nous y aident, et comment. Isaïe : « Ne vous souvenez plus d’autrefois, ne songez plus au passé ». La vie est devant, elle n’est pas en arrière. Cela paraît une évidence. Mais il faut le réentendre. Le péché a quelque chose de statique. Alors que la grâce met en mouvement. Seule la grâce crée, seule la grâce fait du neuf, seule la grâce met en mouvement. Dès lors il n’y a plus à se tourner vers le passé. Dieu qui nous change en nous sauvant nous met en mouvement.

    Nous pourrions ce matin nous interroger sur notre capacité à changer. Sur notre capacité, notre disponibilité à nous mettre en mouvement intérieur. Sur notre capacité à accueillir ce qui nous altère. Tout cela est bien et nécessaire. Cela fait partie de notre chemin de Carême. Mais en ce dimanche, je voudrais nous rendre attentifs à cette réalité possible du dynamisme, du changement (sans aucune allusion politique, évidemment). On peut changer. La grâce nous change. Et la vie, c’est changer.

    Saint Paul vient conforter cette réalité en prenant l’image de la course. « Je ne suis pas encore arrivé, je ne suis pas encore au bout, mais je poursuis ma course pour saisir tout cela… Une seule chose compte : oubliant ce qui est en arrière, et lancé vers l’avant, je cours vers le but pour remporter le prix auquel Dieu nous appelle là-haut dans le Christ Jésus » (Ph 3,12-14).

    Que nous le voulions ou non, la foi de notre baptême nous a mis en mouvement vers la vie, alors que la réalité humaine va de la vie vers la mort. Le baptême a renversé cette réalité, c’est ce que nous célébrons à chaque funérailles. Par le baptême, nous sommes lancés en avant, propulsés de l’intérieur vers Celui qui nous attend, comme le Père de la parabole du fils prodigue. La scène de la femme adultère, lue ce dimanche, nous redit à quel point ce dynamisme appartient à Dieu. Parce qu’il est seul à nous relancer vraiment, à nous remettre en route quand nous sommes en panne. Cette femme qui n’avait rien demandé, s’entend dire « Va et désormais ne pèche plus ». La voici relancée sur le chemin de sa vie. Peu à peu, il lui faut quitter ses oripeaux. Il lui faut se délester de ce qui encombre la manifestation de son identité, de sa vocation à la joie et au bonheur. Peu à peu, il lui faut changer pour devenir ce qu’elle est.
    Quant à nous, qui sommes engagés sur ce chemin de Carême, une espérance nouvelle se dévoile : nous pouvons changer, devenir meilleurs. Ce Carême 2013 nous progressons. Ce Carême 2013, la grâce nous dynamise, et c’est la réalisation profonde de ce que nous sommes, appelés à changer sans cesse. L’enfant n’imagine pas qu’il va changer, parce que son univers lui suffit. Le jeune adulte avance dans cette nouvelle étape de sa vie avec beaucoup d’entrain ou d’appréhension dans ce changement. La personne âgée peut penser ne plus rien espérer de neuf, blasé qu’elle est de tout ce qu’elle a vu et connu. Or, notre identité la plus profonde, celle que Dieu nous a confié, ne se révèle que dans le changement, un changement qui est à l’œuvre toute notre vie, et donc en ce Carême 2013. Je le redis avec le cardinal Newman en ce jour : « Vivre, c’est changer ; être parfait, c’est avoir changé souvent