Transportons nous ce matin au Mont des Oliviers, entre Jérusalem et Béthanie. Avec les apôtres, suivons Jésus une dernière fois au terme de ces 40 jours de temps pascal, pour être avec eux dans cet évènement de l’Ascension du Seigneur. Que peut-il y avoir dans leurs cœurs au moment où ils voient le Christ disparaître à leurs yeux, au moment où on pourrait les penser orphelins, au moment où le Christ les laissent seuls ?
L’Evangile répond à cette question de façon précise : ils sont remplis de joie. Notre psychologie contemporaine est un peu bousculée : comment pourraient-ils être en joie à ce moment où il leur faut faire le deuil de la présence du ressuscité ? Et L’Evangile insiste, ils étaient sans cesse dans le Temple à bénir Dieu.
Louange, bénédiction, joie. Voilà donc la tonalité de ce jour et de cette fête, tonalité qui doit contraster avec le sentiment de l’absence, de la disparition du Christ, de son Corps ressuscité. Scrutons et mettons nous au diapason de ces motifs de joie en ce jour. En voici deux et un troisième.
La joie de la présence. « Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin des temps » dit-il dans l’Evangile selon saint Matthieu. Dans le corps physique de Jésus de Nazareth, dans le corps glorieux du Ressuscité, dans le Corps mystique de l’Eglise, dans le corps sacramentel de l’Eucharistie, sa présence est source de joie. Ces modes de présence nous déconcertent parce qu’ils touchent différemment notre sensibilité humaine de chair et de sang. Evidemment nous serions prêt à courir si l’on nous disait « il est ici ! » ou « il est là ! ». La joie n’appartiendrait alors qu’à son retour dans la gloire. L’Eglise ne serait qu’en deuil en attente éplorée de la fin des temps. Déjà avec la scène des disciples d’Emmaüs, nous voici prévenus, toute trace de sa présence est source de joie. Il s’agit donc de discerner ces traces, ces signes. Et le sacrement vient au secours de notre cécité, de nos aveuglements. On nous dit qu’il est là. Il s’agit de le croire, pour notre joie.
La joie de sa promesse. Le Christ disparaît des yeux des apôtres en assurant qu’ils recevront la force d’en haut. La force d’en-haut, pas celle de la guerre des étoiles avec son côté obscur ou son côté lumineux, mais la présence personnelle de l’Esprit Saint. Pour tout Juif contemporain du Chris, mais pour tout disciple du Christ, Dieu est une promesse. Promesse de vie, promesse joie, promesse de bonheur, promesse d’un chemin de béatitudes. Cette promesse est une joie, parce qu’il y a une joie inouïe à entrer dans l’espérance que cette promesse se réalisera. Et regardez bien dans la suite du texte, comme dans le début du livre des Actes des Apôtres comment l’attente de l’esprit Saint, dans cette neuvaine qui les sépare de la Pentecôte, est assortie d’une joie indicible. Joie de la prière au Temple, joie de se rassembler au Cénacle autour de marie, joie d’agréger Matthias au groupe des Douze.
Joie, joie, joie disait le philosophe Pascal au cœur de la nuit du 23 novembre 1653 où il avait reçu la grâce de cette illumination du cœur qui l’avait embrasé pour tout le reste de sa vie. Il ne s’effraye pas que cette illumination ne dure qu’une nuit. Toute sa vie va être vécue dans le prolongement de cet embrasement du cœur, promesse d’une union encore plus grande, et qui reste à venir.
La joie de la présence et la joie de la promesse. Voici les 2 motifs de joie qui nous sont proposés en ce jour. Nous n’en avons pas d’autres, mais ces 2 nous sont donnés comme nourriture pour le chemin de notre foi, comme gage de notre espérance. Dans la préface de ce jour, le prêtre chantera « le Seigneur Jésus, vainqueur du péché et de la mort [qui] est aujourd’hui ce Roi de gloire devant qui s’émerveillent les anges. Il s’élève au plus haut des cieux, pour être le Juge du monde et le Seigneur des seigneurs, seul médiateur entre Dieu et les hommes ; il ne s’évade pas de notre condition humaine, mais en entrant le première dans le Royaume, il donne aux membres de son corps l’espérance de le rejoindre un jour ».
Joie sur terre à cause de la présence et de celle de la promesse. Mais aussi joie au ciel, parce que les anges s’émerveillent de ce que l’humanité du Christ entre dans la gloire du ciel, en attendant que les membres de son corps le rejoignent un jour. Joie, joie, joie. Ne soyons pas chiches. Entrons dans cette joie du ciel, et cette joie de la terre.