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Homélies - Page 35

  • Jésus passe de ce monde au Père

    lavement_pieds_fanous.jpg« Avant la fête de la Pâques, Jésus, sachant que l’heure était venue pour lui de passer de ce monde à son Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, les aima jusqu'au bout ». (Jn 13,1)

    Ce soir, nous voici donc au cœur de l’incarnation du Christ. C’est cette Heure tant annoncée. C’est le moment de son passage, de sa Pâques. Et saint Jean insiste, l’heure de passer de ce monde à son Père. Jésus passe. En cette nuit de la Pâque juive, nuit de la sortie d’Egypte, nuit du passage de la Mer Rouge, Jésus lui-même passe de ce monde à son Père. Et il y passe par amour, dans un acte extrême d’amour inconditionnel.

    Jésus passe. Il avait passé en faisant le bien, rappelons-nous, sur les routes de Galilée et de Judée, guérissant et soulageant, réconfortant et enseignant. Il a passé en faisant le bien, et il est plutôt bien passé. Les foules ont suivi, elles ont été séduites, retournées. Ont-elles été converties ? C’est autre chose. Plus largement, tout le mystère de l’incarnation du Christ est dans ce passage de Dieu parmi les hommes. Comment le Dieu-Emmanuel pouvait il rester insensible à la misère de ceux qu’il a créés et qu’il aime ? En Jésus, Dieu a passé trente longues années. Il a aimé avec un cœur d’homme, il a travaillé avec des mains d’homme.

    Jésus passe et il passe par amour pour nous. L’évangéliste utilise un mot pour caractériser cet amour : jusqu’au bout. C’est le même mot que nous entendrons demain dans le récit de la Passion, quand au moment de mourir, Jésus dit que « tout est accompli ». C’est un sommet, sommet de son amour pour nous, qui que nous soyons, où que nous en soyons. Ce soir nous voyons des destinataires un peu confus d’un tel cadeau : l’amour inconditionnel de Dieu pour nous.

    C’est que, en Jésus, Dieu ne fait pas que visiter de l’extérieur notre condition d’homme, il la transforme, parce que Dieu ne passe pas sans contaminer notre humanité par sa présence. Quand Dieu passe, il est contagieux. Et ce soir, nous commençons à pressentir ce que cette contagion implique. Il transforme notre humanité, il emporte notre chair. Par amour pour nous, il prend avec lui nos pauvres existences pour que nous recevions sa vie à Lui.

    Ce soir, plus rien n’est comme avant. Au point que l’on pourra dire, avant Jésus-Christ et après Jésus-Christ. Plus rien n’est comme avant, parce que Jésus vit sa Pâque en notre faveur et à notre place. Les discours sont finis, il reste les gestes. Et ce soir, 2 gestes nous sont laissés comme mémorial de ce passage par amour : le lavement des pieds et l’Eucharistie.

    Les Apôtres n’étaient sans doute préparés ni à l’un, ni à l’autre de ces gestes. Tant de fois ils avaient pris le bain rituel avant la Pâque. Tant de fois, le serviteur du maître de maison leur avait lavé les pieds. Tant de fois ils avaient célébré la Pâque juive. Tant de fois, ils avaient consommé ces ingrédients du repas rituel. Voilà que le geste de l’esclave devient le commandement de l’amour. Voici que la consommation en silence devient le geste d’une communion avec la vie même du Christ. Deux gestes où la réalité toute humaine, toute simple est transformée.

    Ce soir, un peu d’eau versé sur les pieds de quelques hommes, va nous rappeler à tous l’amour inconditionnel d’un Dieu qui passe parmi nous et vit sa propre Pâque. De même, un peu de pain et un peu de vin, béni, rompu, partagé, vont nous rappeler cet amour de Dieu qui passe parmi nous et nous emporter avec lui. Nous rappeler seulement ? Pas seulement nous rappeler, mais aussi nous interpeller : comment aimes-tu ? comment sers-tu ? comment vis-tu ? Pas seulement nous rappeler, pas seulement nous interpeller, mais surtout mettre en nous ce germe de Pâque qui sème en nos existences cet amour conditionnel. Tout devient possible, pour qui l’accueille avec gratitude et avec responsabilité

    Jésus passe et nous ne passerions pas avec lui ? Ce soir, à notre tour, nous sommes invités à passer. C’est la fin des discours sur Dieu. C’est le moment de lui parler, comme Jésus parle à son Père dans la longue nuit de Gethsémani. C’est le moment où nous sommes invités à quitter notre place à la fenêtre pour entrer dans la procession qui va vers le Père. C’est le moment où nous décroisons les bras pour ouvrir les mains. Ce soir, commence notre Pâque, celle où nous recevons avec sérieux, avec gravité, avec exigence cette injonction du Christ : « c’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous » ou  plus loin « vous ferez cela en mémoire de moi ».

    Je renouvelle ma question : Jésus passe et nous ne passerions pas avec lui ? Serait-il seul dans ce chemin ? Ne trouverait-il aucun compagnon ? Si ce soir, chacun de nous accepte de passer avec lui,  alors vraiment le Christ vivra sa Pâque en nous. Alors l’amour ne passera pas.

  • Donne-moi à boire

    0a172.jpgNous venons d’entendre ce long récit, ce dialogue peu banal entre un homme épuisé par la chaleur et la route, et une femme anonyme qui vient simplement puiser de l’eau au puits à l’extérieur de la ville. La scène parle d’elle-même. Il a beau être le Messie, le Fils du Dieu très-Haut, le voici assoiffé, éreinté, épuisé par la chaleur accablante, la fatigue de la route et du ministère. Son humanité, les limites du temps et de l’espace se rappelle à lui. Et elle, qui vient pour ce geste si domestique, si simple d’aller chercher de l’eau pour sa propre vie humaine. Rencontre si simple.

    On pourrait être étonné que Jésus traverse cette région qui est en conflit séculaire avec une populaire qui occupe de façon illégitime ce territoire, et ce depuis près de 6 siècles. On pourrait être étonné que Jésus s’adresse à une femme. On pourrait s’interroger sur les motifs de cette femme, sortant à une heure où le soleil brûle et où l’eau n’est sans doute pas la plus rafraîchissante. On pourrait être frappé par la manière dont cette femme prend de l’eau celui qui n’en peut plus, assis au bord de la margelle.

    « Donne-moi à boire ». La préface que nous allons entendre tout à l’heure n’y va pas par quatre chemins : « En demandant à la Samaritaine de lui donner à boire, Jésus faisait á cette femme le don de la foi ». Il se présente comme mendiant, et c’est lui qui va l’enrichir. Il demande à être désaltéré et en fait, c’est lui qui lui donne l’eau vive de la foi. Il lui demande de l’aide pour se conserver dans son humanité, et il lui donne les moyens de grandir dans la vie de la foi, dans la vie divine.

    Il n’est pas facile de percevoir ce que peut être ce don de la foi. Il se présente comme le Messie, comme celui qui montre le chemin du vrai culte, du Père qu’il convient d’adorer. Elle ne se laisse pas seulement amadouer, elle est retournée par la connaissance et l’amour qu’il a d’elle. « Il m’a dit tout ce que j’ai fait, ne serait-il pas le Messie ? »

    La préface insiste : « Il avait un si grand désir d'éveiller la foi dans son coeur, qu'il fit naître en elle l'amour même de Dieu ». C’est le désir du Christ que l’allumer dans le cœur de cette femme le désir de Dieu. Désir d’être connue comme elle est connue de Dieu. Désir d’être aimé comme elle est aimée de Dieu. Désir de vérité et de bonté que seul Dieu peut lui donner. Désir d’un chemin vers le Père que seul ce Messie souffrant peut lui donner.

    Plus tard, à un autre soleil de midi, à l’extérieur d’une autre ville, au zénith d’une autre fatigue, ce même Jésus, ce même Messie, demandera « j’ai soif ».  Ce cri du crucifié ne trouvera pas beaucoup de compassion, et surtout il refusera l’éponge dérisoire qui aurait pu le désaltérer ou même atténuer ses souffrances.

    Mère Teresa de Calcutta a fait inscrire ce cri du Crucifié dans toutes les chapelles de sa Congrégation des Missionnaires de la Charité. « J’ai soif ». Cette phrase, cette demande de mendiant, doit nous poursuivre. Elle déplace l’accent de notre foi. Peut-être vient elle déplacer notre foi, que nous pouvons regarder un peu trop de notre point de vue. Je m’explique : ma foi et mes difficultés à croire et à aimer ; ma foi et mes motifs personnels de m’adresser à Dieu ; ma foi et ce mouvement si intime où je rejoins Dieu.

    Cette question renverse la perspective. Jésus a soif de moi, il a soif de nous. Soif d’une présence, soif d’une réponse libre, soif d’une attention, soif d’un désir. Son désir est d’éveiller le nôtre. Sa faim et sa soif de justice est précisément que nous soyons rassasiés de la communion qu’il propose. Et au moins que nous en ayons le désir.

    Ce dimanche, nous glissons nos pas dans ceux de cette femme. Comme elle n’a pas de nom, chacun peut y mettre son propre prénom. « J’ai soif. Donne-moi à boire » semble nous dire celui qui vient se reposer à nos côtés. Il a besoin de nous pour se reposer. Il a besoin de notre désir pour étancher sa propre soif. C’est vrai à l’ancien puits de Jacob, un lieu d’alliance et d’échange où Jacob avait mené ses troupeaux, où il avait trouvé son épouse. C’est vrai à la Croix, la source d’eau vive, le vrai puits de Jacob, ou le vrai puits de Moïse, où il scelle la nouvelle Alliance.

    « Donne-moi à boire ». Que donnerons-nous en ce jour ? Qu’offrirons-nous à celui qui se présente à nous comme un mendiant, mendiant d’amour, mendiant de présence, mendiant de désir.

  • Soyez saints, car moi je suis saint

    Christ souriant.jpgBeau programme, bel appel du Seigneur à l’imiter, à le suivre, à devenir conformes à ce qu’il nous appelle à être. Dans l’Evangile de ce jour, une phrase presque semblable du Christ clôt le long discours du chapitre 5 commencé avec les Béatitudes : « Soyez parfaits, comme votre père céleste est parfait ».

    « Soyez saints, car moi je suis saint » est un appel finalement assez simple : maîtriser sa violence, ne pas se venger, ne pas garder de rancune bref aimer son prochain comme soi-même. La Loi de Moïse amène cette 2ème partie du Décalogue, après la 1ère : aimer le Seigneur de tout son cœur.

    Dans le discours sur la montagne, le Christ reprend et accomplit ce commandement d’amour donné au Sinaï. Déjà la loi du talion donnait une régulation de la violence inhérente au cœur de l’homme. Un œil pour un œil, une dent pour une dent, pas plus. Régulation du désir de vengeance, limite à la violence individuelle et sociale. C’était déjà un bel objectif.  Mais le Christ se fait un peu plus exigeant, carrément plus exigeant. Ne pas répondre. Ne pas riposter. Tendre la joue gauche. Présenter un autre visage. Là où il y a la haine, que je mette l’amour.

    On raconte que St Maximilien Kolbe, dans le bunker de la faim où il était enfermé à Auschwitz, non est mort le dernier, mais qu’en plus il a exhorté ses compagnons de martyre à rester joyeux et à sourire à leur bourreaux. Le gardien a raconté plus tard que son regard était insoutenable jusqu’au bout. Il a tendu l’autre joue. Il a présenté un visage d’amour là où la haine l’avait giflé.

    Et en ce sens, A cet instant, St Maximilien Kolbe, qui a offert sa vie à la place de ce père de famille qui devait être exécuté, vit pleinement cette loi nouvelle, la loi d’amour du Christ. « On vous a dit : tu aimeras ton prochain, et tu haïras ton ennemi. Moi je vous dis : tu aimeras ton ennemi ». Il n’y a rien de plus facile que d’aimer ses amis. Aimer ceux qui nous ressemblent, aimer ceux de nos groupes humains, ceux avec lesquels nous avons des affinités, des connaturalités. Je dis que c’est facile, mais pas tant que cela ; dans nos familles, dans nos immeubles ou nos quartiers, dans une paroisse, ou dans une entreprise, l’enjeu de cette charité de base n’est pas si simple. Les différences de tempérament s’en mêlent. Les problèmes de communication, les différents, les envies, les jalousies, les petits potins ou les grandes calomnies,… Tout cela fait obstacle et tôt ou tard, nous devenons l’ennemi d’autrui, à moins que cela ne soit l’inverse.

    L’ennemi, c’est celui qui en veut à ma vie. Le Christ vit cet amour des ennemis au pied de la lettre. Il ne répond pas, il ne riposte pas. Dans 2 mois, au moment de la passion, nous le contemplerons monter vers le trône de sa Croix, dignement, présentant sa joue et son dos à ses ennemis, et même demandant au Père du Ciel de les pardonner, à eux pour lesquels il donne sa vie. Ni plus, ni moins. Là où il y a la haine, que je mette l’amour.

    Nous avons peu d’ennemi, au sens où il y a peu de personnes qui en veulent à notre vie. Et pourtant, si je reprends la petite litanie des manques de charité qui encombrent nos relations les uns avec les autres, nous sommes facilement mis en défaut, pour ne regarder les choses que du point de vue de notre responsabilité. Et finalement, les choses sont assez simples, il s’agit de laisser l’Esprit d’amour envahir nos relations et guérir toute cette torpeur qui envahit nos vies. Je prends 3 points concrets pour finir et pour me faire comprendre :

    Ne pas se venger. Que de fois, nous avons été victime d’une injustice, d’une médisance, d’une indélicatesse. Tant que nous n’avons pas pardonné dans notre cœur, il reste une trace dont l’envie de venger est le signe. Soyons magnanimes, abandonnons cette envie.

    Se réconcilier. Les rencontres avec les familles en deuil sont souvent, très souvent le lieu où, comme pasteur, nous sommes témoins de profondes divisions dans les familles. Un problème banal devient l’occasion d’un contentieux, puis d’un conflit, puis d’une rupture. Et personne ne veut faire de premier pas. Soyons humbles, acceptons de perdre la face pour se réconcilier.

    Changer de regard. Le soleil se lève sur les bons sur les méchants. Sur chacun de nous et sur notre voisin ou notre collègue acariâtre. La pluie arrose les bourreaux et les victimes. Sans doute avons-nous à regarder nos petits ennemis comme le Seigneur les regarde, avec miséricorde pour leur personne. La beauté est dans l’œil de celui qui regarde dit le proverbe chinois. L’amour est dans le cœur de celui qui aime, ami ou ennemi. Peu importe.

  • Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté

    61_big.jpgQuarante jours après la fête de Noël, nous voici à Jérusalem avec Marie et Joseph, venant gravir les marches du Temple pour ce geste rituel. 40 jours, ce n'est pas rien. Quarante jours plus tard, les voici dans le brouhaha de la ville, les voici loin de la paisible Bethléem, 9 km plus au sud. Les voici pris dans un déplacement qui les dépasse, comme déjà l'annonce et la naissance de cet enfant les avaient dépassés.

    La Présentation, c'est d'abord une montée. Il faut monter à Jérusalem. Il faut monter au Temple. De partout, il faut monter à la suite de ces foules de pèlerins qui sont montés dans la ville sainte, la ville du grand Roi comme dit le Christ lui-même (Mt 5). Cette montée est même rituelle. On se prépare à cette montée, on chante, on danse, on prie. "Quelle joie quand on m'a dit : nous irons à la maison du Seigneur, et maintenant, nous voici devant tes portes Jérusalem, ville où tout ensemble ne fait qu'un" dit un de ces psaumes des montées (Ps 121). On monte, parce qu'on laisse la plaine derrière soi.on monte parce qu'on va à la Rencontre du Seigneur. Rencontre sérieuse, parce que c'est le Seigneur. Rencontre confiante, parce que c'est le Seigneur.c'est tout sauf une rencontre rituelle.c'est la rencontre qui prépare la rencontre à laquelle tout Juif pieux aspire. Mon âme a soif du Dieu vivant, quand le verrai-je face à face ?

    Et de fait, il y a rencontre, mais pas celle qu'ils auraient pu imaginer. La rencontre se fait avec ces 2 vieillards. Deux petits vieux qui habitent le Temple, comme celle que Jésus remarquera un jour mettant deux piécettes dans le tronc. Deux petits vieux auxquels plus personnes ne faisait attention, tant ils faisaient partie des meubles et du décor. Rencontre décisive pour eux. Rencontre illuminante pour eux. Ils ont attendu et voici que la lumière se lève pour eux. Ils ont espéré la consolation d'Israël, la venue du Messie et le voici à portée de vue, lui qui vient les visiter.cette rencontre entre l'enfant et les 2 vieillards pourraient être touchante, attirant notre sensibilité. En cette fête, cette rencontre vient solliciter notre foi. Dans cet enfant, c'est l'assurance que Dieu vient visiter son peuple.dans ces vieillards, c'est l'assurance que Dieu vient combler toute l'espérance d'Israël, vient illuminer le regard de ceux dont les yeux semblent usé à force d'avoir trop attendu, trop pleuré, trop désespéré. Jésus est cette lumière de Dieu pour toute homme, pour toute vie, quelle qu'elle soit, celle qui a attendu et même pour celui qui n'attendait pas ou qui n'attendait plus. Vous choisirez.

    La présentation c'est enfin une offrande. L'offrande du premier né. Offrande rituelle, que la Loi de Moise prévoit. Depuis la 12ème plaie d’Égypte, les premiers nés d’Israël appartiennent au Seigneur. On les lui offre, une offrande est prévue, plus ou moins importante selon le revenu des parents. Les 2 colombes indiquent que les parents de Jésus sont des pauvres, des pauvres selon la Loi, des pauvres de cœur, des pauvres du Seigneur. Et les voici ces pauvres, qui montent les marches du Temple, qui rencontrent ces 2 vieillards et qui offrent cet enfant. Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté dit Marie. La volonté d'offrir cet enfant, la volonté de collaborer au dessein de Dieu qui lui a été dévoilé à Nazareth par l'ange au jour de l'Annonciation. Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté, dit Joseph.la volonté de prendre chez moi Marie et son enfant, pour être le gardien des mystères de Dieu. Me voici Seigneur, je viens faire ta volonté dit le prêtre qui reçoit cet enfant, pour accomplir les rites de la Loi, selon laquelle cette enfant appartient au Seigneur. Me voici Seigneur dit Syméon, je viens dévoiler le dessein de Dieu pour tout Israël, pour tout homme qui attend la lumière.

    Une question : imaginez-vous que l'enfant Jésus puisse prendre à son compte ce verset de psaume. Me voici, Seigneur, je viens faire ta volonté. Je viens dans le monde, je prends cette humanité, je consens à ton dessein d'amour, parce que ce m'est un besoin d'amour que de me donner, sans mesure, avec une infinie confiance, car tu es mon Père.

    Chers amis, cette offrande du Christ fonde toute offrande. Au delà de la montée vers Dieu, qui est déjà un beau chemin de quête personnelle ; au delà de toute rencontre, qui est également une belle étape ; il y a l'offrande de soi, totale, sans réserve au dessein d'amour et de salut de Dieu. Dans l’Église, nos frères et nos sœurs consacrés ont fait un jour de leur vie cette offrande d'eux-mêmes. Ils la renouvellent intérieurement le plus souvent possible, pour se tenir à cette place de sentinelles de l'amour et de la lumière de Dieu pour ce monde, pour cette humanité. Ce jour est leur jour de fête. Nous les remercions pour ce Oui, cette offrande. Ils nous entrainent à envisager pour nous mêmes cette offrandes, là où nous sommes, là où nous en sommes. L'humanité a besoin de lumière. Il a besoin de sentinelles.

  • Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu se lever une grande lumière

    IMG_0307.JPGEn Bourgogne, comme dans d’autres régions, la lumière du matin arrive doucement. Elle pointe, elle irise peu à peu le soleil, et très progressivement elle s’installe avant que le soleil lui-même jette ses premiers feux. Il en est de même pour le soleil de gloire qu’est le Christ, dans la manifestation progressive du Royaume de salut qu’il instaure.

    Ce verset d’Isaïe, nous l’avons déjà entendu. Souvenez-vous c’était la nuit de Noël. « Sur ceux qui habitaient le pays de l’ombre, une lumière a resplendi ». (Is 9,1). Et pour Israël d’abord et pour l’humanité ensuite, le voici donc ce rayonnement de Dieu, cette manifestation éclatante de l’amour d’un Dieu qui se fait proche.

    Ce dimanche, les lectures semblent être en décalage avec cette affirmation qui nous est pourtant si familière : pour Israël d’abord, pour l’humanité toute entière ensuite. Le texte d’Isaïe et l’Evangile s’intéressent plutôt aux périphéries, pour reprendre cette expression si familière du pape François.  Les périphéries, quelles périphéries me direz-vous.

    La Galilée, cette région du Nord d’Israël, loin du foyer religieux qu’est Jérusalem avec le Temple. La Galilée des nations comme on l’appelait au 1er siècle. La Galilée, mi-juive, mi païenne, soumise à toutes les influences étrangères, influences commerciales (à cause de la route qui relie l’Egypte à Damas), influences militaires en tous genres, influences culturelles et même religieuses. On trouve à quelques kilomètres de Capharnaüm des synagogues du 3ème siècle où la décoration mêlent des symboles juifs et des symboles païens. La Galilée, carrefour des nations semblent être ce peuple périphérique qui habite les ténèbres, pour les quels le Christ lui-même vient dévoiler sa lumière.

    Et comment le fait-il ? Il s’installe à ce carrefour. Il se plante, pardon pour l’expression à ce lieu stratégique, pour y établir au moins provisoirement, sa demeure. Loin, de Bethléem où il ne retournera pas. Loin de Nazareth où il n’a pas été reçu, alors que c’est sa propre patrie. Loin de Jérusalem parce que  pour mieux y faire entendre sa voix. Déjà Jean-Baptiste s’était installé à la périphérie des zones habitées, à l’entrée du désert, pour y faire entendre l’appel brûlant à la conversion. Le Christ s’installe à Capharnaüm pour y établir le Royaume de Dieu, qui est décidément tout proche. Il habite la maison de Pierre. Il arpente les sentiers de Galilée. Il s’assied sur la montagne. Il marche le long du lac. Il appelle. Il prie. Il guérit, pardonne, exorcise, console. Bref, il est tout proche.

    Il est curieux que le Christ enseigne la proximité du Royaume de Dieu en même qu’il appelle à sa suite. « Je vous ferai pécheurs d’hommes ». Cette proximité du Royaume, ce rayonnement de sa gloire, ne se fait pas sans une collaboration humaine qui va solliciter ces pécheurs, pus tard ce zélote et ce collecteur d’impôts. Sans doute sont-ils les mieux à même à comprendre de l’intérieur cette Galilée si bigarrée et si attiédie. En eux-mêmes, ils consonnent tout autant à l’attente du messie, qu’à la confusion et aux ténèbres qui enveloppent les cœurs. Eux aussi marchaient dans les ténèbres. Pour eux d’abord s’est levée une grande lumière.

    Il n’est pas très difficile de nous identifier à eux, nous qui vivons à la périphérie de notre propre identité d’enfants de Dieu, nous qui sommes partagés, et qui, peu ou prou, marchons et boitons dans ce pays des ombres et des ténèbres. Quand je dis qu’il n’est pas difficile de nous identifier à eux, je ne pense pas seulement au fait que cette lumière s’approche de nous, ce qui est déjà source d’émerveillement et de gratitude. Nous pouvons nous identifier à eux, au point même où il vient nous appeler dans les périphéries où nous sommes pour faire de nous ses amis, ses collaborateurs et ceux qui sont appelés à sa suite. Je ferai de vous des pécheurs d’hommes. Pécheurs ils sont. Pécheurs d’hommes ils seront. La théologie y voit un des fondements du ministère apostolique.

    Nous pouvons nous identifier à eux, en ce sens que le Maître de Galilée vient nous chercher là où nous sommes pour nous amener à sa suite et au service de la proximité de son Royaume. En un sens, il a besoin de notre disponibilité concrète pour que la proximité de son Royaume illumine et visite toute périphérie.

    Il a besoin de nous individuellement et communautairement pour manifester la beauté du salut, la bonté de sa miséricorde et l’unité dans la charité. Il a besoin du témoignage de notre unité comme témoignage rendu à son amour. Alors nous comprenons, après cette semaine de prière pour l’unité des chrétiens, qu’il n’y ait pas de divisions entre nous ; que nous soyons en parfaite harmonie de pensée et de sentiments. Que tous nous appartenions au Christ, et non à Paul, ou à Pierre ou à Apollos. La lumière qui se lève ne se divise pas. Elle une et elle unifie.