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Homélies - Page 52

  • Il prit le pain, le bénit, le rompit et le donna

    maaloula_fresque_marsarkis_03.jpgEn ce Jeudi-Saint, nous communions à ce pain. C'est le pain de la Pâque, le pain pris par le Christ dans le repas de cette nuit pour en faire le sacrement de son Corps et de son Sang. C'est le pain azyme qui n'a pas levé, que Dieu donne aux enfants d'Israël comme mémorial de leur libération. C'est le mémorial de la Pâque, au point que tous ceux qui consomment cet Agneau immolé au Temple, revivent la Pâque, sortent à nouveau d'Egypte. Manger l'Agneau, c'est manger la Pâque. Manger ce pain et boire à cette coupe, c'est recevoir ce qui est donné pour que tous aient la vie.

    Vous le savez, ce pain et ce vin, c'est le Corps et le Sang du Christ. Déjà dans le Séder, le repas rituel juif, l'arrivée du Messie est signifiée au moment où l'on consomme en silence le pain tenu caché et la dernière coupe, celle du Messie justement. Par ces paroles « Ceci est mon corps, ceci est mon sang », le Christ en a fait le sacrement de sa présence : celle qui vient de cette nuit de la Cène, ou celle qui vient de la fin des temps. Je vous propose de lui appliquer ce que l'Evangile dit du pain, pris, béni, rompu et donné. Il est Celui qui est pris du milieu des hommes, qui habite parmi nous. Il est Celui qui est béni du Père, consacré par l'Esprit qui est sur Lui, béni, consacré, glorifié par le Père comme le rapporte les Evangiles où sa vie suinte les œuvres du Père comme une huile qui déborde. Il est Celui qui est rompu, s'abaissant dans l'incarnation rédemptrice, dans la mort et la mort de la croix, homme de douleurs, agneau immolé qui répond sa vie. Il est Celui qui est donné à ses disciples qui nous le donnent aujourd'hui. Il n'est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu'on aime.

    Ce soir, nous commémorons l'institution de l'Eucharistie qui est précisément ce sacrement de la présence du Corps et du Sang du Christ. Il est donné à toute l'Eglise, pour que chacun de nous en fasse, non seulement sa nourriture, mais également la règle de sa vie baptismale. Comment cela ? Reprenons ces quatre verbes du récit. Chacun de nous peut se découvrir pris, béni, rompu et donné. Pris de façon personnelle, c'est-à-dire appelé chacun par son nom, discerné, élu, aimé. Béni, lavé et consacré dans les eaux du baptême et par l'huile de la confirmation, objet de la sollicitude du Père. Rompu à notre péché, à notre amour-propre, désincarcéré de la gangue qui emprisonne nos capacités à aimer et à pardonner. Donné là où nous sommes, pour que le monde croie et qu'il ait la vie.

    Ce soir, il vous est proposé ce soir de regarder l'Eucharistie, avant d'y communier dans la nuit sainte. En la regardant vous pourrez peu à peu devenir ce que vous recevez membre du Corps du Christ. Toute votre vie peut devenir eucharistique si vous acceptez dimanche après dimanche, et plus si affinité, de vous unir à ce pain pris, béni, rompu et donné. Comment vous unir, par cette participation intérieure, cette présentation intérieure de vous-même qui vous associe à cette offrande du Christ dans ce pain et ce pain. Le voici, ce sacerdoce baptismal dont la liturgie du baptême nous parlera samedi.

    Pour l'exercer, tous nous avons besoin des ministres choisis par le Christ. Ce jour, ce soir est également l'anniversaire de l'institution du sacerdoce apostolique. Les prêtres ont renouvelé à la messe chrismale les promesses de leur ordination, en mémoire de ce jour où ils sont nés. « Vous ferez cela en mémoire de moi », c'est la consigne intimée par le Christ à ses apôtres et à leurs successeurs. Dans la liturgie de l'ordination, l'évêque leur a demandé de « prendre conscience de ce qu'ils feront, de vivre ce qu'ils accompliront et de se conformer au mystère de la croix ». Vivre ce que nous accomplissons. Là encore, l'Eucharistie nous donne la clé. Ils sont pris du milieu des hommes, pris dans une histoire personnelle, une culture, une formation, des qualités, des défauts. Ils sont bénis non seulement par l'amitié du Christ qui les prend pour être avec lui, mais par une consécration qui les fait agir en sa personne même. Ils sont rompus par leur célibat, par leur ministère, dans leur volonté propre, leur exercice de l'autorité. Enfin, ils sont donnés. Ils vous sont donnés pour être à votre service et celui du bien commun de toute l'Eglise. Ils vous sont donnés pour votre communion. Ils ne sont pas des miroirs de la communauté, mais plutôt des icônes du Christ qui se donne à vous, ou mieux encore : des sacrements de la charité pastorale du Christ qui vous donne de vivre la charité fraternelle. Leur sacerdoce ministériel est au service de votre sacerdoce baptismal.

    Dans un instant, cette condition de serviteur de la charité de Dieu pour vous va nous être rappelée par ce geste d'une haute portée spirituelle qu'est le lavement des pieds. Le Christ nous sauve en s'abaissant. Ce soir, ce n'est pas un acte du passé. C'est aujourd'hui qu'il se dépouille dans l'Eucharistie et dans le lavement des pieds. Là est la source de l'amour et de la charité. Il est grand le mystère de la foi !

     

  • Il crut et... il vit !

    christ_healing_blind.jpgSur notre marche, nous voici avec cet aveugle de Jérusalem. Nous lisons cet Evangile en Carême, dans notre progression vers Pâques. Le fait du miracle est déjà éloquent. Un aveugle recouvre la vue. Il ne voyait pas, il voyait. Comme celui de Jérico, comme les paralytiques, les lépreux, les sourds et muets, comme tant d'autres, il est guéri, comme rétabli dans sa beauté première, dans son intégrité de créature créée et aimée de Dieu. Le Christ montre sa puissance de créateur. Comme dans le récit symbolique de la création, la vie surgit à partir de la boue, la glaise dont sort Adam qui en portera désormais le nom.

    La guérison est admirable, mais tous les aveugles du temps de Jésus n'ont pas été guéris. Je pense qu'il nous faut aller chercher plus loin la portée de cet Evangile pour notre chemin de Carême. C'est son chemin qui peut nous enseigner : guéri sans l'avoir demandé, il proclame Jésus prophète dont on est disciple, puis il confesse la divinité du Christ (je le crois, Seigneur) et se prosterne devant lui.

    Ce n'est pas neutre qu'il soit un aveugle pour cet itinéraire de foi. Il était dans la nuit, noire et épaisse. Jamais la lumière du soleil n'était entrée au fond de son âme. D'autres lumière avait peut-être fait leur chemin en lui : lumière de l'amour reçu de ses parents, lumière des sens qui informe par la douceur d'une caresse, le bruit d'un cri ou la chaleur d'une parole, l'odeur d'un épice ou d'un plat. De l'intérieur, il apprit à voir d'une autre manière. Sans pouvoir de vérifier par ses yeux, c'est comme si déjà il voyait de l'intérieur. Depuis son enfance, une autre manière de voir lui avait peut-être permis de voir ce que les autres eux-mêmes ne voyaient pas. Au fond, sa nuit humaine était déjà comme éclairée, par une autre manière de voir que celle de ses contemporains.

    En image, en figure, la nuit de cet homme nous parle de la foi. Dans la nuit que nous sommes, en ce chemin de Carême, nous marchons vers le jour clarteux (lumineux) où nous verrons Dieu face à face dans l'éblouissement de l'avènement du Fils de l'Homme. Qui est-il donc, c'est Jésus que cet homme voit face à face et qui lui parle. Il a vu et il a cru, comme Jean au Tombeau.

    La foi vient éclairer notre nuit de l'intérieur. Par la foi, nous croyons, mais nous ne savons pas. Nous croyons parce que nous faisons confiance en cet autre mode de connaissance, en attendant le jour où nos yeux seront ouverts.

    Le baptême nous a donné cette foi lumineuse, qui nous malgré la nuit, nous fait reconnaître le Corps et le Sang du Christ dans ce pain et ce vin, qui nous fait reconnaître la Parole de Dieu dans ce livre, qui nous fait reconnaître un frère à aimer dans ce voisin acariâtre et insupportable,... les exemples pourraient suivre.

    De la même manière que la vue n'est pas le seul mode de relation au monde extérieur, pour cet aveugle de naissance, la seule expérience sensible et intellective, celle qui s'arrête aux apparences, ne peut être le seul mode de connaissance. Cet homme nous est donc précieux parce qu'il nous enseigne que la foi est possible et qu'elle débouche sur le jour où nous voyons celui auquel nous donnons notre foi. Nous serons d'autant plus comblés que nous découvrirons qu'il est l'auteur de notre foi, celui qui nous l'a donné en plénitude au jour de notre baptême, alors que le cierge a été allumé au cierge pascal.

    Lumière née de la lumière, il chasse toute ténèbre. Il éclaire tout homme, il transforme ceux desquels il t'approche. Il nous communique sa lumière, pour que nous vivions en enfants de lumière. Comme une veilleuse, il dépose en nous la lumière de la foi, pour qu'elle nous éclaire de l'intérieur.

    Il cru et il vit. Pour nous qui avons reçu le baptême, pour les catéchumènes, nous croyons et alors nous voyons différemment. Parce que cette douce lumière lave notre regard et le transforme en profondeur. Nous regardons Jésus comme le Fils du Dieu vivant et pas uniquement comme un prophète des temps anciens, un guérisseur. Nous regardons l'Eglise comme une communauté de foi, son peuple saint en marche vers la sanctification de tous les pécheurs qui la composent, et non comme l'association loi 1901 des amis du charpentier, où tout nous séparerait (ciné, politique, codes sociaux, revenus,...). Nous regardons notre liturgie comme une action commune pour lui rendre grâce et non comme une auto célébration.

    Il cru et il vit. Ce Carême vient comme rénover et guérir notre vision, celle que donne la lumière de la foi. Dans nos obscurités, allume le feu qui ne s'éteint jamais, dit le chant de Taizé.  Que cette douce lumière fasse son chemin en nous, pour que nous croyons et que dans la nuit de Pâques, nous voyons.

     

  • Vous avez dit jeûne ?

    vendredi-saint.jpg

    1. Chers amis, nous voici donc embarqués, tous ensemble, dans cette montée vers Pâques. Dans quarante jours, nous serons au seuil du mystère pascal, mourrant et ressuscitant avec le Christ. Largement et comme une mesure débordante, la grâce pascale inondera nos pieds au soir du Jeudi-Saint, elle illuminera nos visages au seuil de la Vigile pascale, elle nous rassasiera de son amour au matin de Pâques. Au long de ces quarante jours, grâce et avec tous les catéchumènes, nous allons nous y préparer activement.

    2. Pour l'heure, nous nous mettons en route pour cette montée, avec finalement peu de bagages.  L'Évangile du jour des Cendres semble n'en admettre que trois : l'aumône, la prière et le jeûne. Trois bagages qui sont là pour nous alléger dans cette montée à Jérusalem. Et même, ces trois bagages n'ont qu'une seule fonction : nous désencombrer de tout ce qui nous empêche d'accueillir la grâce pascale. Nous n'aurons pas trop que ces 40 jours pour ce vaste travail de désencombrement, avec ces seuls bagages. Si vous le voulez bien, c'est à propos du jeûne que je vous voudrais m'arrêter. Le message de Carême de Benoît XVI sera plus explicite encore.

    3. Qu'est-ce que jeûner ? Jeûner, c'est se priver de tout aliment pendant un espace donné (une journée, une semaine...) ou encore ne manger qu'une seule fois par jour; c'est le sens du jeûne que demande l'Église pour deux jours de l'année: le Vendredi-Saint et le mercredi des Cendres. Concrètement, si vous avez déjà fait un repas ce midi, inutile de vous encombrer l'imagination (carpe farcie ou quiche aux deux saumons,...) pour ce soir. Le jeûne est donc différent de l'abstinence des vendredis de Carême (et même de tous les vendredis de l'année sous certains aspects) consiste à s'abstenir de certains aliments plus substantiels (ce qui est pratiquement défini pour la viande). Voilà le minimum défini par l'Église. Charge à chacun d'en faire sa loi et d'y ajouter ce qui lui semble approprié pour cette tâche de désencombrement.

    4. C'est que le jeûne a quelque chose qui relève de l'expérience spirituelle et non pas de la thérapie de bien-être corporel ou de l'héroïsme. Il s'agit de se priver de nourriture pour être empli d'une nourriture spirituelle. Être en quelque sorte creusé pour manifester notre ouverture, notre disponibilité à ce que Dieu veut mettre en nous. Dans son message de Carême 2009, le pape Benoît XVI ajoute : "nous Lui permettons de venir rassasier une faim plus profonde que nous expérimentons au plus intime de nous : la faim et la soif de Dieu". Vous pourriez me dire que l'intention suffirait, que tout cela se passe entre Dieu et moi, et qu'il voit bien le fond de mon cœur et de mon âme. Ce serait perdre de vue trois aspects du jeûne.

    5. Le premier est qu'il implique notre corps. C'est bien parce que notre personne unifiée, corps et âme, qui est en relation avec les autres et avec Dieu. Or, le corps est le support concret de ma relation aux autres qu'il est également le moyen de ma relation à Dieu. Tout passe par la médiation de notre corps : nos sentiments, nos émotions, nos paroles, nos actes, notre travail,... Et même notre relation à Dieu passe par cette médiation corporelle. Notre rapport à la nourriture exprime quelque chose de nous-mêmes, tous les psychologues le savent. Or, cela exprime également quelque chose de notre âme. C'est pour cela que le jeûne, comme pratique de pénitence corporelle, fait partie de cette médiation-là.

    6. Le second élément va plus loin. C'est que notre jeûne est un acte de solidarité. Par notre jeûne, nous nous souvenons que des millions de nos contemporains n'ont pas de quoi manger. Dans cette société faite de consommation et de distraction, de pain et de jeux, nous dosons notre nourriture et notre boisson. Par là, nous expérimentons librement ce que tant d'hommes et de femmes subissent, quelque fois à quelques dizaines de mètres de nous. Et nous nous plaindrions de ces quelques efforts qui nous ouvrent corporellement à la souffrance d'autrui. Isaïe le prophétisait déjà quand il disait que le jeûne qui plaît à Dieu c'est de « partager ton pain avec l'affamé, héberger chez toi les pauvres, vêtir celui qui est nu, ne pas se dérober devant celui qui est ta propre chair » (Is 58,7) Par le jeûne et le partage qui en découle, nous nous désencombrons de l'égoïsme, nous acceptons d'être le gardien de notre frère. Nous nous rendons sensibles à sa souffrance et nous proclamons l'injustice.

    7. Le dernier élément est le sens ecclésial du jeûne de ce jour et du Carême : c'est l'ensemble de toute l'Église qui aujourd'hui se prive de nourriture pour s'entraîner au combat spirituel comme le disait la prière d'ouverture. Chacun est libre d'y ajouter un jeûne d'ordinateur, de voiture, de tabac, de paroles, que sais-je encore. L'aspect ecclésial de notre jeûne est à prendre à compte, parce ce Carême concerne toute l'Église qui veut revenir au Seigneur son Dieu de tout son cœur. Toute l'Église reçoit les Cendres sur son front en signe de pénitence, toute l'Église prie et toute l'Église jeûne. L'émulation communautaire est donc une aide puissante pour ce jeûne et ce Carême. C'est ensemble que nous serons renouvelés dans notre foi pascale. C'est ensemble que nous nous y désencombrerons. C'est ensemble que nous jeûnons aujourd'hui. Et déjà cela nous aide.

     

  • Présentation au Temple

    100_6437.JPG« Joyeux nous aussi d’aller à la rencontre du Sauveur, nous te chantons… » (préface de la Présentation du Seigneur)

    Quarante jours après Noël, la liturgie nous entraîne au Temple pour la Présentation du Seigneur. Acte rituel d’offrande du premier-né (Ex 13, 1), pour lequel la législation mosaïque (Lv 12, 8) permettait aux parents modestes d’un simple couple de colombes. Acte familial d’une solennité bien restreinte. Acte d’une portée messianique qu’il faut méditer.

    « Soudain viendra dans mon Temple celui que vous cherchez » (Ml 3, 1)

    Dans l’évènement de cette présentation se noue une réalité d’une immense portée : la Gloire de Dieu, sa Présence qui avait quitté le Temple, selon la vision d’Ezéchiel (Ez 11, 22), cette Présence entre dans le Temple. Les portes peuvent s’ouvrir et élever leurs frontons, selon le psalmiste. Les Chérubins peuvent se crier l’un à l’autre : « Saint, Saint, Saint, le Seigneur de l’univers » (Is 6, 1). C’est que Dieu entre dans son Temple.

    L’évènement est certes discret. Les montants des portes ne tremblent pas. Les Chérubins ne crient pas. Pas de théophanie. Pas de liturgie solennelle. Pas de cors, ni de harpes, ni de cithares. Et pourtant, Dieu entre dans son Temple. Et il y entre parce qu’il assume le temple d’un corps humain. Le lien entre la Nativité et la Présentation apparaît plus en lumière. « Il parlait du Temple de son corps » (Jn 2, 21). Par cohérence de la révélation, l’évènement enseigne aux témoins et aux lecteurs que l’achèvement est réalisé dans la personne de Jésus, fils de Marie de Nazareth. Discrètement, mais réellement, Dieu qui est entré dans le sanctuaire de l’humanité, entre dans son Temple.

    « Voici la lumière qui éclaire les nations » (Lc 2, 32)

    La lumière ne pouvait être cachée. Certes, elle a illuminé la grotte ou la crèche de Bethléem, ville royale. Certes, elle a reçu, comme en miroir, l’éclat des cadeaux des mages, prémices des nations. Il faut qu’elle soit mise sur le lampadaire pour qu’elle éclaire. Syméon le prophétise, parce que c’est bien ce qui se réalise à ses yeux fatigués d’avoir attendu, mais espérant contre toute évidence humaine.

    La lumière devra être mise sur le lampadaire. Ce ne sera pas les bras du vieillard qui élève l’enfant en cet instant. Ce ne sera pas non plus ceux d’une mère qui apprendra à devenir disciple de Celui qui est la lumière du monde. Ce sera encore moins la montagne où il apparaîtra transfiguré aux yeux endormis de ses apôtres. Ce sera le lampadaire de la Croix où elle-même un glaive lui transpercera le cœur (Lc 2, 35).

    La rencontre entre la lumière et celui qui la reconnaît est précieuse : c’est une rencontre de foi où le vieillard reçoit toute l’expérience croyante d’Israël. En cet instant, sa voix rassemble celle de tous les prophètes. Ses yeux condense le regard de foi de tout l’Ancien Testament pour discerner, comme un veilleur attend le jour (Ps 130 (129), 6), l’arrivée du Messie. Heureuse rencontre, parce que nous y sommes comme convoqués.

    « Joyeux nous aussi d’aller à la rencontre du Seigneur… » (préface du jour)

    Il entre dans son Temple et nous convoque à l’accueillir, telles les vierges sages courrant à la rencontre de l’Epoux qui vient au milieu de la nuit (Mt 25, 10). La liturgie du baptême nous y invite déjà, quand en confiant la lumière du Christ au baptisé ou à ses parents, parrains ou marraines, le ministre précise : « Veillez à l’entretenir : que cet enfant, illuminé par le Christ, avance dans la vie en enfant de lumière et demeure fidèle à la foi de son baptême. Ainsi, quand le Seigneur viendra, il pourra aller à sa rencontre dans son Royaume avec tous les saints du ciel » (Rituel du baptême)

    Saint Cyrille de Jérusalem condense en quelques oppositions denses ce retournement où nous sommes convoqués à cette rencontre. Alors que se consommeront nos chandelles, que son homélie pour cette fête nous invite à la réalité de cette rencontre :

    « Je vois l’enfant s’avancer de Bethléem vers Jérusalem, sans quitter la Jérusalem d’en haut. Je vois l’enfant sur la terre présenter une offrande au temple selon la prescription de la loi ; mais il reçoit au ciel l’adoration de toutes les créatures ; je le vois porté par les bras du vieillard selon le dessein rédempteur, et dans sa majesté reposer sur le trône des chérubins. Il est offert et consacré, mais c’est lui qui consacre et purifie toutes choses ; il est l’offrande et il est aussi le temple ; il est le prêtre et il est aussi l’autel. Il est l’agneau et il est le feu subsistant. Il est l’holocauste et il est le glaive de l’Esprit. Il est le pasteur et il est l’agneau ; il est le sacrificateur et aussi la victime. Venez tous, vous qui aimez le Christ, vous qui aimez Dieu. Accourrons à la rencontre de notre Seigneur et de notre roi, purifiés et éclatants de lumière, non pour obéir à la Loi, mais poussés par l’Esprit. Oui, aujourd’hui, préparons des lampes brillantes et, comme des fils de lumière, offrons des cierges au Christ, lumière véritable, car il s’est manifesté au monde, lui la lumière qui doit éclairer les nations païennes. » (Homélie sur la manifestation du Seigneur, PG 33, 1202)

     

     

  • Ils étaient frappés de son enseignement

    Christ-en-majeste.jpgIl les enseignait comme quelqu’un qui a l’autorité, et non pas comme les scribes. Car il ne disait pas: «Le Seigneur dit ceci», ni: «Celui qui m’a envoyé dit cela»; il parlait en son nom, lui qui primitivement avait parlé par les prophètes. Il y a une nuance entre les expressions: Il est écrit et: Le Seigneur dit cela; mais il est encore différent de dire: En vérité, je vous le dis. Voyez par exemple: Il est écrit dans la Loi: «Tu ne tueras pas, tu ne commettras pas l’adultère.» Il est écrit; mais par qui? Par Moïse, Dieu le faisant son mandataire. Si cela est écrit de la main de Dieu, comment oses-tu dire, toi: En vérité, je vous le dis, dans la mesure où tu n’es pas le premier à avoir formulé la loi? Nul n’est habilité à changer la loi, hormis le roi en personne. Mais est-ce le Père ou le Fils qui a donné cette loi? Pour moi, c’est équivalent. Si le Père a donné cette loi, c’est également lui qui la transforme; or le Fils est son égal, lui qui change ce que l’autre a ordonné. Que ce soit lui qui ait donné la loi ou qui l’ait transformée, il faut une égale autorité pour donner et pour modifier: nul ne peut le faire hormis le roi.

    Et ils étaient frappés de son enseignement. Qu’avait-il donc enseigné de nouveau? Qu’avait-il proféré d’inouï? Il disait, lui personnellement, ce qu’il avait fait dire auparavant par les prophètes. Et ils s’étonnaient, car son enseignement donnait à penser qu’il détenait l’autorité, contrairement aux scribes. Il ne parlait pas comme un maître, mais en tant que Seigneur. Son propos ne se référait à aucune autorité supérieure, il parlait en son nom propre. Il le disait d’ailleurs; lui qui s’adressait à eux en ce moment était celui qui avait parlé par les prophètes: Je suis celui qui parlais: me voici.

    Mais il se trouvait un esprit impur qui avait été le premier dans la synagogue, qui avait conduit tous ces hommes à l’idolâtrie et à propos duquel il est écrit: Un esprit de fornication vous égare; il s’agit de cet esprit qui était sorti de l’homme et s’en allait dans le désert en quête d’un repos qu’il ne trouva pas, et qui revint dans sa demeure primitive en compagnie de sept autres démons. Quelle entente entre le Christ et Béliar? Le Christ et Béliar ne pouvaient être associés l’un à l’autre.

     

    Homélie de saint Jérôme, prêtre (Homélies sur Marc 1, 21-24)