Restons ce dimanche avec cette réplique de St Pierre, alors que Jésus vient d’annoncer, une première fois dans une série de 3, sa Passion. Réaction vive de Pierre, alors qu’il prend jésus à part. Réaction enflammée du 1er des apôtres, qui lui vaudra la réponse cinglante de Jésus. Pierre ne veut pas que son Messie souffre et meure. Humainement, on peut comprendre. Qui voudrait que son ami, que son leader meure dans l’échec apparent de sa mission ?
Revenons en arrière, depuis le début du ministère public de jésus, tout semble marcher. L’appel des disciples dont celui de Pierre après une pèche miraculeuse, les miracles en tous genres dont ils ont étaient des témoins oculaires ébahis et enthousiasmés. Pensez donc : des aveugles voient, des sourds entendent, l’eau est changée en vin, le pain est multiplié, la tempête est apaisée, des morts ressuscitent. Et il y a les enseignements qui expliquent, entraînent, encouragent, ouvrent le chemin vers l’amitié avec le Père. Et il y a les foules nombreuses, venant de loin. Bref, c’est le succès.
Succès visible et audible, succès paradoxal à certains moments, au point que Jésus doit fuir la foule qui veut le faire roi, au point qu’il demande souvent le secret sur sa condition de Messie. Parce que c’est bien de cela qu’il s’agit. Il n’est pas révolutionnaire ou un prophète de plus, ni un beau parleur, ni même un guérisseur efficace. Il est le Messie promis et attendu par Israël.
Dimanche dernier, nous nous souvenons d’avoir entendu cette question posée à ses disciples : « pour vous, qui suis-je ? » et la réponse prompte et audacieuse de Pierre : « tu es le Messie, le Fils du Dieu vivant ». Au nom des disciples, et inspiré par le Père, Pierre confesse cette foi dans la personne divine du Christ, le Messie, le Fils du Dieu vivant. Confession de foi balbutiante pour des lèvres humaines, mais a le parfum de la vérité. Jésus est le Christ, le Messie, le Fils du Dieu vivant.
L’Ancien Testament et l’effervescence messianique de cette période attendant plusieurs figures de Messie. Un Messie politique, un Roi qui restaurait Israël, ce qui dans le contexte de l’occupation romaine prend des contours précis, vous imaginez bien. Un Roi prêtre, qui restaurerait et purifie le Temple et le culte rendu à Dieu dans cette Maison du Seigneur. Un Messie prophète qui remettrait tout le peuple dans le chemin vers Dieu. Bref des figures messianiques assez triomphantes, dont les critères d’authenticité sont finalement assez simples, puisque c’est le succès de leur mission qui sont la seule attestation.
Jésus ne s’identifie à aucune de ses figures, mais bien à celle qui est délicatement caché dans l’Ancien testament, chez Jérémie par exemple le prophète persécuté, et surtout chez le prophète Isaïe qui nous parle d’un mystérieux serviteur souffrant. Humilié, meurtri, défiguré, il n’a ni beauté ni éclat, il est comme une brebis que l’on mène à l’abattoir. Par ses souffrances nous sommes guéris. Jésus sera ce Messie souffrant, celui qui réalisera cette prophétie, qu’encore aujourd’hui on ne lit pas dans le judaïsme, tellement elle est insupportable.
Il faut qu’il monte à Jérusalem, qu’il souffre, qu’il soit tué et que le 3ème jour il ressuscite. La mission de salut de jésus n’est pas un long fleuve tranquille. Il lui faut passer par cette Pâque où englouti dans la Passion volontaire, immergé dans les eaux de la mort, il remonte triomphant le 3ème jour., et nous emmène avec lui vers la vie. Le salut n’est pas un long fleuve tranquille, et les apôtres ont à le découvrir et à s’y préparer. C’est touchant de voir à quel point, leur prédication après la Pentecôte insistera sur l’importance du mystère pascal : la mort en vue de la vie, l’offrande du Fils qui donne sa vie pour ceux qu’il aime.
Si pour Jésus, le salut, n’est pas un long fleuve tranquille, alors pour nous non plus, la suite de Jésus ne sera pas un long fleuve tranquille. Et d’ailleurs, il nous prévient : « Si quelqu’un veut marcher à ma suite, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa croix et qu’il me suive. Car celui qui veut sauver sa vie la perdra, mais qui perd sa vie à cause de moi la trouvera » Renoncer, perdre, prendre sa croix. Voilà le programme de la suite de Jésus. Se décentrer, combattre son petit égoïsme, abandonner le souci de soi et la promotion de soi, s’ouvrir aux autres, donner et se donner… Voilà toutes les petites croix qu’il s’agit de prendre et de reprendre au quotidien.
Chaque jour je recommence et je reprends le chemin avec Jésus. L’expérience nous apprend que la vie en général n’est pas un long fleuve tranquille, sauf peut-être l’insouciance relative des vacances. La vie avec jésus n’est elle-même pas un fleuve tranquille. Nous ne savons pas toujours où il veut nous emmener. Nous ne connaissons pas toujours les chemins qu’il veut nous faire prendre. Dieu nous semble étrange, parce que nous restons dans nos pensées et dans nos habitudes, alors qu’il s’agit dans les pensées et les habitudes de Dieu.
Confiance donc sur ce chemin, que nous reprenons aujourd’hui. Confiance et lâchons prise