L’Evangile que nous venons d’entendre nous présente Jésus au milieu de ses disciples au soir de Pâques. Ils sont encore enfermés dans la chambre haute. Ils sont encore partagés, incrédules pour certains. Ils sont encore hésitants. Et voilà qu’il est au milieu d’eux, toutes portes closes.
Je vous propose de recevoir cette page d’Evangile en nous remémorant ces 10 semaines que nous venons de passer dans nos maisons ou nos appartements, confinés que nous étions à domicile. Recevoir cet Evangile en se souvenant d’abord que le Christ fait fi de ce confinement des apôtres pour les rejoindre, que ce soit un enfermement physique (par peur des circonstances selon le texte), ou un enfermement spirituel, celui de la peut ou de l’incrédulité des apôtres. Peu importe : il les joint, pour leur faire ce cadeau inouï d’une apparition. Et il n’y en aura pas tant que cela. Et il souffle sur eux pour répandre en eux l’Esprit.
C’est donc un peu étonnant d’entendre cet Evangile qui nous parle du soir de Pâques, en cette fête de la Pentecôte, alors que nous sommes 50 jours plus tard. Etonnant de revenir dans cette chambre haute où les disciples semblent avoir leurs quartiers : au soir du Jeudi Saint, au soir de Pâques et ensuite à la Pentecôte. A Jérusalem, la chambre haute du Cénacle fait mémoire de ces 3 scènes. Je vous y emmène donc.
Il faut entendre que ce lieu où ils sont enfermés est un lieu de grâce. Un lieu de préparatif, un lieu que le Seigneur vient habiter de la sa présence. Un lieu où ils ne resteront certes pas, parce que la Passion les en fera sortir ; et surtout après la Pentecôte, ils pourront sans retenue aller et venir pour devenir les messagers joyeux des merveilles que Dieu a faites : pensez donc, il a ressuscité son Fils qui a emmené avec lui toute mort, toute peur et toute tristesse.
Ce lieu si discret et si domestique, ce lieu où ils sont réunis avec et autour de la Vierge Marie est un lieu où ils sont enseignés et enfanté par le Christ à leur vocation d’apôtre, c’est à dire disciples et de missionnaires. Chacun d’eux peut dire : « je suis né là-bas ». Le pape Jean-Paul II y avait signé en 2000 une lettre aux prêtres où il invitait chacun prêtre à considérer sa naissance spirituelle au Cénacle.
Chacun de nous, tous baptisés, au moment où nous pouvons à nouveau sortir de nos maisons, nous avons quelque chose à apprendre de la spiritualité du Cénacle, cette chambre haute. C’est là que nous sommes mis en présence avec le Seigneur de la vie. C’est là qu’il nous enseigne. C’est là qu’il nous façonne et nous enfante à ce qu’il veut de nous. Avec Jacob, nous pourrions dire « Dieu est là et je ne le savais pas ». Dieu qui est présent, Dieu qui enseigne et conforte, Dieu qui soutient et accompagne. Sa présence est discrète, mais elle est d’autant plus efficace que nous avons le désir de sa présence.
Nourri de cette expérience, dont il nous faudra bien faire mémoire, c’est donc changés que nous sortons de la chambre haute de nos maisons ou de nos appartements. Je m’explique : c’est altérés que nous reprenons le chemin de nos activités. On nous a dit que le monde d’après ne ressemblerait pas au monde d’avant. Alors chiche, en commençant pour chacun de nous. Il serait dommage de revenir au monde d’avant, comme si rien ne s’était passé, sans recueillir le fruit de ce confinement qu’aura été un goût renouvelé pour la prière ou la lecture, un désir gourmand (au bon sens du terme) de l’Eucharistie, une relation nouvelle entre conjoint ou en famille, un soin et une attention délicate envers nos voisins, nos amis, telle ou telle personne seule. Souvenons-nous de ces moments de grâce et de lumière. Souvenons-nous de ces moments spirituels vécus en famille certains soirs ou certains dimanches matins. Souvenons-nous que nous sommes devenus des acteurs, et pas simplement des consommateurs, de notre relation au Christ avec son Eglise.
Ne perdons pas trop vite le sens de ce Cénacle qui a recueilli notre quotidien pendant 70 jours, en revenant à au consumérisme marchand, à l’activisme ou à la tiédeur précédents. Je vous propose de garder très concrètement la mémoire de ce Cénacle dans nos maisons. Ce peut être un coin Cénacle ou un temps Cénacle. Ce sera le mémorial de notre enfantement à cette vie de fils et de filles de Dieu qui sont appelés à devenir des apôtres, cette vie de disciples-missionnaires.
Le moment d’après a déjà commencé. Le Christ nous y accueille, dans le feu de son Esprit !