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C'était la sixième heure, environ midi

476650579_ae28e58517.jpgVoici un Carême bien particulier pour cette année où nous sommes amenés à vivre des précautions inédites, à mettre en œuvre des dispositions un peu anxiogènes. Des gestes liturgiques si habituels nous sont retirés pour un cordon sanitaire invisible, pour une menace dont nous pourrions nous sentir indemnes. Le déni, la colère, la négociation et la résignation peuvent nous habiter tour à tour.

Et il faut tout de même revenir au Carême, à l’Evangile et à Jésus. En fait nous n’en sommes pas vraiment sorti si nous considérons que le Christ a connu mille et unes limites humaines, maille et unes épreuves, menaces, sans compter un chemin qui le mènera jusqu’à la mort et la mort sur la Croix.

Devant la richesse de ce long chapitre 4 de St Jean, je veux d’abord retenir un des premiers versets qui ouvre cette scène : « Jésus, fatigué par la route, s’était donc assis près de la source. C’était la sixième heure, environ midi ». Et il eut soif, au point de demander à boire à cette femme.

Avant de parler du dialogue en vérité avec cette femme, qui semble le prendre de haut dans un premier temps, avant de parler de la manière dont il descelle la source de la foi dans le cœur de cette femme, avant de parler de la révélation inouïe qu’il lui fait de son identité de Messie, avant même de parler de la manière dont elle devient disciple-missionnaire, avant tout cela, je veux m’arrêter à cette fatigue du Christ au milieu du jour. C’est l’heure la plus chaude. C’est l’heure où tout s’arrête parce que le matin est loin et que le soir l’est aussi. C’est l’heure du repos, mais aussi de l’ennui, du découragement ou du désoeuvrement. C’est l’heure de celui qui n’en peut plus de porter tout ce qu’il porte : l’annonce du Royaume, les contradictions, l’obstination et la fermeture des cœurs, le péchés des uns, les récriminations des autres.

Cette heure là en annonce une autre, celle où le Christ sera dressé sur la Croix, celle où il portera tous nos péchés nos souffrances et nos infirmités. Celle où il sera au bout de ses forces humaines qui le quitteront peu à peu, parce que rien ni personne ne le désaltéreront plus, alors qu’il dira à nouveau sa soif. J’ai soif.

Donc Jésus s’asseoit sur la margelle du puits, épuisé, en attendant d’être désaltéré par un cœur qui a soif. Un proverbe persan dit : ce n’est pas l’eau qui manque, c’est la soif. Il cherche des cœurs qui ont soif.

Pour cette femme, la soif de Dieu était bien enfouie sous ses différents désordres : désordres conjugaux d’un amour en grande errance, d’un péché qui la dévorait ; mais aussi désordres religieux d’une idolâtrie concurrente du culte du Dieu vivant. Comme une source enfouie, la soif de Dieu était là mais ne demandait qu’un sourcier pour la désignait et la desceller.

Jésus s’assit sur le bord du puits et il demande à boire. Dans quelques semaines, nous allons contempler celui qui est dressé sur la Croix et qui demande à boire, qui cherche des cœurs qui ont soif. Ste Teresa de Calcutta avait écrit cette demande du Christ dans chaque chapelle de sa congrégation des missionnaires de la charité.

Il s’assit donc sur la margelle de nos cœurs, de nos vies, de nos existences. Et il nous demande d’être réconforté par nos présences, nos propres soifs de lui. Nous sommes loin d’un Evangile que nous serions de rendre un peu abstrait, cérébral, et finalement désincarné. Jésus a soif d’une présence, soif d’une réponse libre, soif d’une attention, soif d’un désir. Son désir est d’éveiller le nôtre. Sa faim et sa soif de justice est précisément que nous soyons rassasiés de la communion qu’il propose. Et au moins que nous en ayons le désir.

Ce dimanche, nous glissons nos pas dans ceux de cette femme. Comme elle n’a pas de nom, chacun peut y mettre son propre prénom. « J’ai soif. Donne-moi à boire » semble nous dire celui qui vient se reposer à nos côtés. Il a besoin de nous pour se reposer. Il a besoin de notre désir pour étancher sa propre soif. C’est vrai à l’ancien puits de Jacob, un lieu d’alliance et d’échange où Jacob avait mené ses troupeaux, où il avait trouvé son épouse. C’est vrai à la Croix, la source d’eau vive, le vrai puits de Jacob, ou le vrai puits de Moïse, où il scelle la nouvelle Alliance.

« Donne-moi à boire ». Que donnerons-nous en ce jour ? Qu’offrirons-nous à celui qui se présente à nous comme un mendiant, mendiant d’amour, mendiant de présence, mendiant de désir.

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