En ce dimanche de la Sainte Famille, la liturgie nous donne un portrait de ce à quoi nos familles humaines sont appelées : imiter les vertus de la Sainte Famille. Et les 2 lectures, Siracide et St Paul aux Colossiens, nous donnent quelques clés pour envisager les relations familiales dans l’exemple et dans la grâce de cette sainte Famille de Nazareth. Un point retient mon attention, c’est en particulier celui qui s’attarde sur les relations entre parents et enfants. Sur ce point, ces 2 lectures transpirent du IVème commandement qui demande d’honorer son père et sa mère. Honorer son père, glorifier sa mère, soutenir son père dans la vieillesse, ne pas le chagriner durant sa vie, ne pas le mépriser même quand son esprit l’abandonne, déployer patience et miséricorde… Tout cela décline de façon si concrète et si délicate l’enjeu de ce IVème commandement.
Nous le lisons en ce jour où la liturgie nous fait honorer la Sainte Famille, de Jésus, Marie et Joseph. Déjà, l’ordre par lequel on la nomme n’est pas anodin. Et il me semble que l’Evangile nous dévoile comment Joseph a vécu et pratiqué ce IVème commandement, à l’égard de ce fils qui est confié. Prenons donc le temps de regarder Saint Joseph, dont finalement l’Evangile parle peu.
Déjà dimanche dernier, IVème dimanche de l’Avent, l’Evangile nous présentait cette belle figure, dans l’annonce qui lui était faite en songe par l’Ange du Seigneur : « Ne crains pas de prendre Marie chez toi »
C’est que Dieu visite Joseph, et encore aujourd’hui avec 3 autres visites, toujours en songe. Et l’on pourrait s’interroger sur cette particularité masculine. Pourquoi Dieu ne visite-t-il que des hommes en songe pendant leur sommeil ? Adam, Abraham, Jacob, Gédéon. L’activisme masculin a-t-il besoin d’être mis en sommeil pour que Dieu puisse enfin parler. Le judaïsme n’est pas en reste pour cette interprétation quand il considère que les obligations rituelles de prière ne pèsent que sur les hommes, parce qu’à la différence des femmes, ils ne sont pas naturellement religieux, pas naturellement reliés à Dieu. La question reste entière
Joseph le Juste se voit donc à nouveau visiter, à 3 reprises dans notre Evangile, par l’Ange du Seigneur. Il se voit confirmé dans cette vocation d’être le gardien de l’Enfant et de sa mère. Gardien de l’Enfant Jésus, gardien des mystères du salut, gardien du dessein de Dieu pour Israël et toute l’humanité.
A lui reviendra la charge d’imposer le nom à l’enfant, comme lui avait dit l’Ange : « Tu lui donneras le nom de Jésus, c'est-à-dire Dieu sauve ». Dès lors, il lui faut protéger ce salut si fragile, soumis à toutes les précarités : la fragilité physiologique du nourrisson, la pauvreté sociale, la violence qui pourrait même s’abattre sur lui à cause de la fureur du roi Hérode.
Joseph a à veiller sur cette flamme vacillante qu’est le salut que représente cet Enfant. Le consentement au projet de Dieu donné lors de la 1ère visite de l’Ange doit être renouvelée autant de fois possible.
2 vertus de Joseph peuvent attirer notre attention ce matin :
La première est sa promptitude. Dès le réveil, au sortir du songe, Joseph se lève et fait ce que l’ange lui avait annoncé. En lui, il n’y pas d’écart, pas de distance entre ce que Dieu dit, ce que Joseph veut et ce qu’il fait. Pas de discussion, ni de négociation avec Dieu. Pas de procrastination, ni d’hésitation. Il se lève et il fait.
Et cette promptitude est une caractéristique des justes de l’Ancien Testament pour lesquels nous lisons cette même simplicité à mettre en pratique ce que Dieu demande. Quand ils consentent, ils se mettent à l’œuvre de Dieu, quoiqu’ils en comprennent. Notre mentalité contemporaine est quelque fois aux antipodes de cette vertu biblique, et notamment celle de St Joseph
La deuxième vertu de St Joseph à regarder ce matin est celle qui le fait accepter de se mettre en route aussi souvent que l’Ange le conseille, avec abandon pour le chemin tracé pour un temps. C’est comme si la lumière sur ce qui est à faire n’était donné que pour un temps, un pas seulement. Dieu ne lui éclaire toute la route à suivre, mais seulement le pas de ce jour : partir en Egypte, revenir en Israël, s’installer à Nazareth.
Le consentement de Joseph se fait abandon à celui qui seul est la route et le chemin. Il ne maîtrisera que ses pas, que le consentement à se mettre en route. Notre cher St John Henry Newman l’exprime dans une prière célèbre : « I don’t ask to see the distant scene, on step enough for me ». Je ne demande pas à voir les horizons lointains, un seul pas c’est assez pour moi.
Ne pas tout voir, ne pas tout connaître, ne pas tout maîtriser. Simplement consentir au dessine de Dieu. St Joseph, prie pour nous.