Nous voici entrés dans le temps de l’Avent. Je ne sais quel parfum et quelle couleur il a pour vous. Un parfum de vin chaud, de cannelle et pain d’épices. Des couleurs verte et rouge, des lumières de bougies dans la nuit. Et du reste, nos rues se sont illuminées. Les arbres de Noël commencent à pousser ici et là, même dans le chœur de notre église. La crèche fait son apparition. Et hier soir ici même, les santons se sont animés pour la joie des grands et des petits. Et bientôt on va nous parler de la magie de Noël. Magie de lumière et de fête. Magie de retrouvailles. On mangera, on boira. Pas tous hélas.
Je ne sais pas si vous remarquez à quel point les lectures de ce jour sont loin de cette perspective, cette manière de voir Noël. Les lectures de ce jour annoncent et célèbrent une venue, celle du Fils de l’Homme, celle de notre salut. C’est que l’Avent est justement l’annonce et la célébration de l’avènement du Fils de Dieu. Et de fait, dans 4 semaines nous fêterons l’avènement du Fils de Dieu dans la chair. En lui, on peut dire que la nuit est finie. Qu’en lui le jour de notre salut s’est fait proche. Qu’en ce enfant de Bethléem la joie a été donnée à la terre, parce que Dieu a visité son peuple. Mais n’anticipons pas trop sur cette joie à venir. Ne faisons pas de Jésus un prématuré.
La liturgie de ce 1er dimanche de l’Avent nous parle d’un autre avènement, d’une autre venue. Cette autre venue, nous l’annonçons quand nous profession « nous attendons ta venue dans la gloire ». Cette venue est certaine, parce que l’Evangile et toute l’Ecriture nous l’annonce. L’Evangile de ce jour parle de cette venue du Fils de l’homme en des termes qui peuvent nous paraître terrifiants. La soudaineté de cette venue du Fils de l’Homme semble surprendre tous, ou plutôt tous qui sont dans l’indolence et l’insouciance : on mange, on boit, on se marie, rien de grave, mais personne ne semble se soucier de quoi que ce soit.
Nous avons suffisamment d’expérience de la vie pour savoir qu’ l’inattendu arrive toujours. L’inattendu dans nos vies, dans nos familles et même à l’échelle de nos sociétés. L’évènement inattendu dans un emploi du temps, la contrariété professionnelle inattendue, l’ami qui arrive à l’improviste, la panne inattendue, le cambriolage inattendue (c’est d’ailleurs l’exemple que prend le Christ dans l’Evangile).
La venue du Christ ne se présente pas comme un évènement inattendu. St Paul insiste : « la nuit est bientôt finie, le jour est tout proche ». Dieu est proche, plus proche de nous qu’il ne l’était hier encore. C’est que le Seigneur vient de la fin des temps pour nous visiter, pour rassembler en lui toute la création. Nous l’avons fêté la semaine dernière dans la fête du Christ Roi et nous voici à nouveau avec cette réalité. Nous ne pouvons pas dire que nous ne savions pas.
Une fois annoncée cette venue, cet avènement à venir, il faut entendre l’avertissement de St Paul comme celui du Christ : « Tenez-vous prêts ». Il a été accroché en banderole sur notre couronne de l’Avent. Ce qui est annoncé de cette venue ne saurait nous surprendre, si nous avons tenus nos cœurs en éveil. Et que veut dire tenir nos cœurs en éveil ? Comme les bergers, ils s’agit d’être des gardiens vigilants, fidèles et sensés de tout ce qui nous a été confié : gardiens de la création, gardiens de nos frères, gardiens de nous-mêmes, gardiens de Dieu.
Gardiens de la création parce que notre responsabilité est immense dans ce domaine. Nous ne pourrons pas nous présenter devant le Fils de l’homme comme des prédateurs et des gaspilleurs. Gardiens de nos frères parce que nous nous avons été confiés les uns aux autres, d’une manière ou d’une autre. Gardiens de nous-mêmes parce que c’est le prix de notre liberté que d’en user de façon digne et responsable. Et enfin gardiens de la transcendance qui a été déposée en nous. Nous sommes gardiens de cette parcelle divine qui fait que les pieds sur terre, nous avons la tête au ciel et pas l’inverse.
« La nuit est bientôt finie, le jour est tout proche ». Voici bien une bonne nouvelle pour ce premier dimanche. Le salut s’approche de nous. La joie que nous souhaitons va nous illuminer. Ce jour est à venir. Pour m’expliquer je vous laisse ce que l’aveugle dit à la fin de la Pastorale des Santons de Provence entendu ici hier : «Je sais que le monde il est beau, puisque c'est lui qui l'a fait mais je suis sûr que le ciel est encore plus beau puisque c'est là qu'il habite. Non, demandez-lui seulement que j'aille pas longtemps à attendre. Faites que j'ouvre les yeux le jour de ma mort. Faîtes que je vois quand ça vaudra vraiment la peine de voir ». Nous sommes tous un peu des aveugles. C’est pour cela que la nuit est bientôt finie. Et que le jour est tout proche.