« Je suis venu allumer un feu sur la terre. Je dois recevoir un baptême »
Jésus continue de monter à Jérusalem. Après les débuts en Galilée, après les miracles et les enseignements qui semblaient si faciles à entendre et à recevoir, voici que Jésus monte à Jérusalem pour y vivre sa Passion, sa mort et sa résurrection. Et il n’a de cesse de prévenir ses disciples pour les préparer à ce sommet de sa mission. L’Evangile d’aujourd’hui nous laisse entrevoir comment il entrevoit lui-même cette mission. Je vous propose de nous glisser dans cette intimité qu’il laisse entrevoir. Il s’agit de nous décentrer de nous-même, de notre manière de vivre la foi, pour entrer simplement dans son intimité à lui, dans ses sentiments à lui.
Un feu et un baptême. Peut-être vous souvenez-vous que St Jeran Baptise avait prévenu haut et fort à propos du Christ : « Lui vous baptisera dans l’Esprit Saint et le feu ». C’est bien ainsi que Jésus conçoit sa mission. Elle est mission de feu et de plongée dans l’Esprit Saint. Elle est feu qui détruit et purifie. Elle est feu qui éclaire et illumine. Elle est feu qui embrase et consume. A la Pentecôte elle est même feu qui fait parler, qui rend contagieux et qui envoie en mission.
Ce feu le consume lui-même. Elle est un feu qui le brûle intérieurement, comme une passion ardente, pour le salut et la vie de tous. D’où une impatience ardente « comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ». Il lui en coûte d’avoir à attendre. Il veut en découdre. Il est profond remué jusqu’aux entrailles par la détresse et l’indigence de toute l’humanité. Cette passion pour notre salut, pour notre relèvement est vraiment, littéralement un feu dévorant en lui.
Mais cette mission culmine dans un baptême qu’il lui faut recevoir. « Je dois recevoir un baptême, et quelle angoisse est la mienne jusqu’à ce qu’il soit accompli ». A première vue, cette phrase nous est difficile à entendre. N’a-t-il pas reçu le baptême de Jean Baptiste aux bords du Jourdain, lui qui n’a pas besoin de ce rite de reconnaissance des péchés en vue de la venue du Messie. Déjà il avait accompli ce rite en solidarité avec les pécheurs que nous sommes. Il avait déjà témoigné de sa sollicitude, de sa solidarité profonde avec toute l’humanité en descendant au point le plus bas, non seulement de la terre, mais surtout de l’expérience humaine. Dans ce baptême dans le Jourdain, il s’est abaissé pour nous relever. Et ce faisant, il annonçait un autre baptême à venir, celui de sa Passion, de sa mort et de sa résurrection. Et nous y voici. La Passion de Jésus est un baptême, littéralement un plongeon dans la mort en vue de la résurrection.
Et Jésus désire ce baptême, cette Passion. Il ne fait qu’y consentir, comme on le ferait d’un projet extérieur à nous. Il la désire, il la veut. Il s’y engage. Et même il est impatient d’y être. Sans regarder en arrière, sans s’attarder, sans pusillanimité, il monte vers cette Passion volontaire
Notre baptême et notre confirmation furent une plongée dans cette Passion du Christ. Nous avons été nous-mêmes associés intérieurement à ce feu et ce baptême dans la Passion du Christ. C’est dire à quel point cet évènement est devenu existentiel pour nous. Nous pourrions nous habituer. Nous pourrions même en neutraliser l’importance en nous. Mais nous avons eu part à cette mort et résurrection.
Reste donc à faire nôtre les sentiments qui sont dans le cœur du Christ : cette impatience, cette ardeur, ce feu contagieux. Nous savons avoir des projets. Nous savons être habités par de beau désirs, par de belles passions, que ce soit dans la vie familiale, dans la vie professionnelle, ou la vie associative ou sociale. Et qu’en est-il de notre foi, de ce cadeau déposé au fond de nos vies aux jours bénis de notre baptême et de notre confirmation ?
Ce feu déposé en nous ne demande qu’à se transmettre. Ce baptême reçu ne demande qu’à être contagieux. En parlant des disciples-missionnaires, le pape François ne cesse d’insister sur le fait que la rencontre avec le Christ est source d’une transformation intérieure et d’un témoignage en faveur de Jésus. Pour finir, je vous laisse ce passage du texte Evangelii Gaudium n° 264 La première motivation pour évangéliser est l’amour de Jésus que nous avons reçu, l’expérience d’être sauvés par lui qui nous pousse à l’aimer toujours plus. Mais, quel est cet amour qui ne ressent pas la nécessité de parler de l’être aimé, de le montrer, de le faire connaître ? Si nous ne ressentons pas l’intense désir de le communiquer, il est nécessaire de prendre le temps de lui demander dans la prière qu’il vienne nous séduire…
Que le Seigneur nous communique encore et encore le feu qui le dévore. Qu’il nous séduise pour que ce feu devienne contagieux.