C’est le cri du Seigneur pour nous aujourd’hui. Un cri plein de tendresse et d’affection, comme le disait le prophète Joël entendu en 1ère lecture : « revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour ». Et voilà qui peut déjà éclairer notre Carême. Il s’agit de revenir au Seigneur, à la suite de son invitation si insistante, et si aimante.
Au seuil de ce Carême, au soir de cette journée de jeûne, les Cendres vont recouvrir notre tête ou notre front : ce sont les cendres que la Bible réserve à Job, Judith, Esther et tant d’autres, tous ceux qui font pénitence ou qui prennent le deuil. On déchire son vêtement, on se couvre de cendres et on implore la miséricorde, pour demander pardon et pour s’approcher à nouveau du Dieu trois fois saint. Ces cendres sont l’expression d’une démarche humble. Ces cendres, ce sont également la poussière du livre de la Genèse, glaise primordiale qui nous rattache à la condition originelle et fragile du premier homme : Adam, pétri de la poussière, tiré de la terre et, à qui il est promis qu’il y retournera.
Ces cendres, nous allons simplement les recevoir, pour entrer tous ensemble dans ce temps si particulier du Carême. Tous ensemble, en Eglise, à un moment qu’aucun d’entre nous n’a choisi. L’Eglise nous fait donc entrer en ce jour dans le temps du désert propice à la conversion, lente marche laborieuse et ascétique vers l’homme nouveau que le Maître de nos vies veut restaurer en nous.
Je me permets de vous faire remarquer que pour faire ces cendres, il faut que le feu ait embrasé le buis des Rameaux de l’an dernier que vous avez déposés. Ces buis ont servi à acclamer le Christ entrant triomphalement dans Jérusalem. Ces cendres vont marquer nos fronts pour que l’amour de Dieu entre à nouveau dans nos cœurs.
Pour faire ces Cendres, il y a eu feu et braises, avant qu’elles ne refroidissent pour être déposé sur nos fronts. Ces cendres nous rappellent donc le feu et les braises ardentes de la foi de notre baptême, le feu et la braise de notre ferveur première, que nous avons laissé s’éteindre peu à peu. C’est donc un peu avec confusion que ce soir nous recevons sur notre front la trace de notre tiédeur, de nos lâchetés, de notre orgueil, bref de tout ce que le péché a éteint en nous.
Du coup, ces 40 jours ne seront pas de trop pour qu’un vent puissant vienne souffler sur elles pour faire rejaillir le feu qui couvait encore sous la cendre. Et quel feu, puisque ce sera le feu de la Vigile pascale ! Le feu de cette invitation et de cette initiative première de Dieu qui vient à nous.
Ce soir, nous voici donc entre deux feux, deux foyers ardents : celui de notre baptême et sa réactualisation dans celui de Pâques. Entre temps, nous avons besoin d’être secoués, réveillés. Ces 4à jours, ce temps long va nous y aider. La dimension ecclésiale de notre Carême va nous y aider. Et nos efforts en terme de jeûne, de prière et de partage vont nous y aider. Je ne saurais que trop vous recommander la méditation de l’Evangile de ce soir et la mise en œuvre de ce programme. Des propositions concrètes nous seront faites pour vivre ensemble ce Carême 2019.
Mais en cet instant, je veux seulement insister sur ce moment si précieux dans l’année où nous décidons tous ensemble de réponse à l’appel de l’Eglise et du Christ de nous convertir. C’est le moment favorable. C’est le moment de notre salut. Laissons-nous réconcilier avec Dieu.
Evidemment nos efforts auront leur importance. Mais peut-être que l’effort premier sera de nous appliquer à vivre ce Carême. Nous appliquer dans les exercices de prière que nous avons déjà. Nous appliquer dans les efforts de partage concret que nous faisons déjà. Nous appliquer dans ce désencombrement qu’est le jeûne et que nous faisons peut être déjà. Cette application sera bien l’expression de cette intériorité dont parle le Christ dans l’Evangile de ce soir : ton Père qui voit dans le secret te le rendra.
Ce Carême 2019 n’est pas celui de l’année dernière. Quelque chose doit changer, parce que Dieu le veut pour nous et il nous y invite avec tout l’amour dont il est capable pour nous séduire et nous attirer à Lui. Quand tout à l’heure, vous allez entendre le prêtre vous imposer les cendres en disant : « convertissez-vous et croyez à l’Evangile », je vous propose d’entendre à nouveau Dieu crier à notre cœur tiède et paresseux : « Revenez à moi de tout votre cœur, car je suis tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour ».