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"Tu offriras ton fils unique en holocauste"

bc6a862d373aab8c38c56403a261e1a5.jpgNous voici ce dimanche avec la figure d’Abraham, le père des croyants, celui qui est déclaré juste parce qu’il a cru aux promesses de Dieu. Peut- être 1800 ans avant le Christ, voici un croyant, le modèle des croyants.

Nous sommes gâtés par le livre de la Genèse qui nous dévoile en plusieurs belles pages l’itinéraire de foi de cet homme, mis en mouvement par la seule parole de Dieu : Quitte ton pays et la maison de ton père pour le pays que je t’indiquerai. Et les promesses suivent : promesse d’une terre, promesse d’une descendance nombreuse. Promesse qu’Abraham ne verra que de loin. Il verra la terre sans vraiment y habiter. La descendance tardera à arriver, c’est Isaac, le fils unique. Voilà qui fait peu au regard des étoiles du ciel, ou du sable au bord des mers.

« Prends ton fils, ton unique, celui que tu aimes… et là tu l’offriras en holocauste ». Il nous faut reconnaître que la parole de Dieu est obscure, comme elle l’a peut-être été pour Abraham. Comment Dieu pourrait-il reprendre ce qu’il avait donné, si tardivement ? Comment Dieu pourrait se contredire en promettant une descendance et en semblant la faire disparaître ensuite ?

« Tu l’offriras… ». Dieu demande à Abraham l’offrande du fils unique. Ce fils est l’enfant de la promesse. Il est un don de Dieu. Plus tard, après la sortie d’Egypte, Dieu demandera que les premiers nés lui appartiennent de la 1éème plaie, celle de la mort des premiers nés qui aura permis la sortie d’Egypte. Cette appartenance est comme une consécration.

Isaac n’est pas que l’enfant de la vieillesse d’Abraham et de Sarah. Il est l’enfant donné à Dieu en signe de réalisation de sa promesse. Il n’appartient pas à Abraham. Dans le judaïsme, on nomme ce passage, le sacrifice d’Abraham, pas celui d’Isaac, au sens où c’est Abraham qui est sacrifié : sacrifice de sa volonté, sacrifice de son sentiment de possession, de sa réappropriation des dons de Dieu. Si Abraham ne comprend pas, c’est parce que l’ordre de Dieu lui arrache ce qu’il s’est privatisé à ce point. L’enfant de la promesse restera l’enfant de la promesse.

« Tu l’offriras en holocauste ». Là encore, nous pouvons être pris à rebrousse poils à l’endroit de cet ordre de Dieu. Il ne s’agit pas seulement d’offrir, mais d’offrir en holocauste, en sacrifice. Dans la législation ultérieure, celle du Lévitique, l’holocauste est un sacrifice où la victime est non seulement mise à mort, mais dont tout est brûlé. Le terme a pris au XXème siècle une actualité tragique.

Mais le tragique était déjà présent dans les peuples environnants, dans la culture religieuse contemporaine d’Abraham. Ces sacrifices humains, et même les sacrifices d’enfants, sont une pratique ô combien courante. Or, l’Alliance du Dieu unique ne saurait tolérer cela. Si les êtres humains appartiennent à Dieu, parce qu’ils viennent de lui, parce qu’il leur donne la vie la croissance et l’être, il ne saurait exiger un tel sacrifice de la vie. Dieu ne se contente pas de purifier la volonté d’Abraham, il met fin aux sacrifices humains en instituant des sacrifices de substitution. Le bélier à la place d’Isaac. Et plus tard, le pain et le vin à la place de tout animal.

« Tu offriras le fils unique, le bien-aimé ». Ce bien-aimé dévoile son visage à la Transfiguration. Avant que resplendisse sur la gloire de la résurrection, il faudra que le Fils passe lui-même par cette offrande volontaire de la Passion et de la Croix. C’est le nouvel Isaac qui porte lui-même le bois du sacrifice. C’est le nouvel Isaac qui monte en silence vers le lieu de l’immolation. Sa volonté n’a pas besoin d’être purifiée, elle est au diapason absolu de celle du Père.

On pourrait s’interroger sur les modalités de ce salut : n’aurait-il pas pu se faire différemment, plus paisiblement, moins tragiquement ? C’est que l’offrande volontaire du Fils le conduire à s’abaisser plus encore. Le très bas vient rejoindre l’expérience humaine, au plus bas, là où nous-mêmes ne voudrions évidemment pas aller, mais où souffrent tant d’hommes et de femmes. Il n’est rien de l’expérience humaine qui ne soit étranger au Christ : rien de la souffrance, rien de l’abandon et de la trahison, rien de l’humiliation et de l’échec, rien de la mort. Il n’a pas fait semblant. Il ne nous pas aimé pour rire, dit Ste Angèle de Foligno, une dominicaine du XIVème siècle.

J’en termine avec cette citation de la 2ème lecture : « Il n’a pas épargné son propre Fils, mais il l’a livré pour nous tous : comment pourrait-il, avec lui, ne pas nous donner tout ? ». L’offrande d’Abraham annonce celle de la Croix. Elle nous dit les modalités de l’Alliance nouvelle et éternelle. Celle que nous allons célébrer dans 5 semaines ici, celle que nous célébrons à chaque Eucharistie, ici et même maintenant.

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