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Christ-Roi

n656172207_951811_6769.jpgDans l’Évangile selon saint Matthieu que nous avons entendu tout au long de cette année A, nous sommes rendus au chapitre 25 : le Christ est entré à Jérusalem, y subit la controverse rude et piégée des pharisiens et des docteurs de la Loi, juste avant les événements déterminants de la Passion, où le Fils de l’homme vient pour juger du trône de la Croix. La liturgie nous fait lire cet évangile dans la perspective eschatologique du Christ Roi. Roi de l’univers, Roi de la Création, Roi d’amour et Roi de gloire, Roi de toute puissance et de toute l’humanité, qui à la fin des temps vient juger et tout remettre à son Père.
La perspective plonge et soutient notre regard de foi dans cette direction, chose à laquelle nous ne sommes pas naturellement enclins. Le Christ qui vient de la fin des temps. La science fiction nous présente souvent un futur très loin, une galaxie perdue et des personnages qui traversent le temps menaçant tel ou tel équilibre, finalement un gentil réussit toujours (même si c’est au dernier) à contrer une menace qui nous a fait tant tremblé. Il ne s’agit pas de cela : il s’agit du vrai Dieu, du Christ annoncé par les prophètes, du Seigneur Jésus advenu lorsque les temps étaient accomplis pour inaugurer un règne de grâce. Il viendra à nouveau, comme il l’a annoncé, dans sa gloire pour établir définitivement son règne de justice et de paix, d’amour et de vérité.
Aujourd’hui, nos regards sont tournés vers cette fin qui vient à nous, vers cette royauté instaurée où le royaume nous est donné en héritage. Mais nos regards sont également tournés vers nous-mêmes, vers la manière dont nous avançons les arrhes de cet héritage. Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. St Jean de la Croix commente à sa manière cette sentence du Christ : c’est sur l’amour que nous serons jugés.
L’eschatologie est donc en germe dès ici-bas, dès maintenant. Ce que nous serons dans et avec le Royaume du Père Céleste, dépend dès aujourd’hui de ce que nous faisons. Et c’est bien en ce sens précis qu’il faut comprendre la royauté sociale du Christ, qui est un autre aspect de cette fête. Le Pape Pie XI a institué cette fête liturgique en 1929 en souhaitant que les hommes en viennent à « reconnaître l’autorité royale du Christ dans leur vie privée et dans leur vie publique ». L’autorité sociale du Christ est bien là : parce que nous sommes des personnes, c'est-à-dire des êtres sociaux (un animal social), le déploiement de notre vocation à recevoir l’héritage du Royaume passe nécessairement par la vérification de notre toute notre vie à l’aune de la royauté du Christ : Ce que vous avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. Cette sentence du Christ vient après la question : Quand t’avons-nous vu nu, en prison, affamé ? Les réactions des uns et des autres sont relativement touchantes, elles traduisent soit une certaine candeur, soit un certain aveuglement.
La voilà la vraie royauté sociale du Christ : agir comme si nous avions envers le Christ ou comme si le Christ agissait en nous. Agir comme si nous servions le Roi, ou comme si le Roi agissait par nous mains et nos lèvres.
Beaucoup de systèmes politiques ou idéologiques ont voulu résumer, même incarner, la royauté sociale du Christ. Royauté de droite ou de gauche, mais toujours royauté défigurée. Il est plus exigeant, et sans doute plus conforme à la vigueur de l’Évangile que cette royauté sociale commence avec la dimension intérieure et sociale de chaque cœur et d’abord (pourquoi pas ?) par ceux qui ont la charge du bien commun. De là, la royauté sociale du Christ peut alors toucher peu à peu, comme un feu qui court sur les chaumes, une famille, une communauté de travail humaine, une culture, un peuple. Il ne suffit pas de mettre une croix sur un drapeau pour étendre la royauté sociale du Christ. On ne baptise pas les nations, les entreprises comme on baptise les personnes. Souvenons-nous du slogan de l’action catholique : nous referons chrétiens nos frères : Nos frères, et pas nos institutions ou nos sociétés.
Et pourtant, le paradoxe est que, à la lumière de l’Évangile de ce dimanche, nous découvrons que ce que nous réalisons, construisons dès ce monde-ci anticipe et annonce le Royaume à venir. Jean-Paul II résumait ce paradoxe dans un très beau passage de son encyclique Sollicitudo Rei Socialis de 1989 : L’Église sait qu’aucune réalisation temporelle ne s’identifie avec le Royaume de Dieu, mais que toutes les réalisations ne font que refléter et, en un sens, anticiper la gloire du royaume que nous attendons à la fin de l’Histoire, lorsque le Seigneur reviendra.
Dans cette Eucharistie, sur cet autel même, c’est ce Seigneur de gloire qui dans un instant va venir de la fin des temps. Dans un instant nous allons anticiper l’histoire et accueillir le Maître des temps et de l’Histoire. Il va venir sur le trône de nos mains et de nos lèvres pour nous communiquer son Royaume et dire à chacun de nous : Venez les bénis de mon Père, recevez le seul, l’unique royaume celui qui ne passe pas, préparé pour vous depuis la création du monde.

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