Nous voici en cette fête de l’Epiphanie avec cette attitude d’adoration des mages. Déposant leurs présents, tombant à genoux après leur poursuite de l’étoile, ils se prosternent devant l’Enfant de la crèche.
A la nuit de Noël, c’est le chant des anges qui avait attiré les bergers jusqu’au lieu de la naissance du Christ. Au jour de l’Epiphanie, c’est l’Etoile et l’Écriture interprétée par les scribes de Jérusalem qui introduisent les mages à l’adoration, à cette prosternation où ils confessent par tout leur être la divinité de l’Enfant. « Nous sommes venus nous prosterner devant lui », disent-ils à Hérode.
Quatorze fois dans l’Evangile selon saint Matthieu, Jésus reçoit l’hommage de la prosternation de ceux qui viennent au devant de lui pour lui demander un miracle ou pour confesser leur effroi devant la puissance de sa gloire, comme après la résurrection. A chaque fois, cette attitude traduit le fait que tout l’être s’abaisse devant celui qui est tout, infiniment puissant et glorieux, infiniment saint. Cette prosternation est belle : elle indique à quelle point l’homme se connaît petit et humble devant le Roi des rois, le Seigneur des Seigneurs.
Nous sommes trop habitués à côtoyer, à tutoyer Dieu. Dieu est peut-être proche, plus proche à nous même que nous-mêmes, mais il n’en reste pas moins le Saint, celui qui veut être l’objet de nos louanges, parce qu’il est saint, fort, immortel. Les crèches de nos maisons et de nos églises nous montrent des étables peuplées de personnages tournés et prosternés d’une manière ou d’une autre vers l’Enfant-Dieu. Cette fête de Noël, la méditation devant nos crèches pourraient laisser monter en nous ce sens de l’adoration de Dieu, ce sens de la louange : il est Dieu, et je ne suis qu’un homme. Il est éternel et infini, et je ne suis qu’un être fini. Il est mon Créateur et je suis créature, créé par lui.
Remarquez bien que cette adoration se fait de la part des mages, c’est à dire d’hommes qui sont étrangers à toute la tradition religieuse d’Israël. La foi juive sait à quel point, on ne peut voir Dieu sans mourir. L’effroi sacré, la crainte respectueuse ne sont pas réservées aux prêtres qui montent aux Temple ou aux prophètes qui ont une vision. Tout juif se sait sous la protection du Dieu Très-Haut, dans la main de Celui dont il se sait créé et sauvé. Hérode le confessera à sa manière en prétendant qu’il ira, lui aussi, se prosterner devant le roi des juifs qui vient de naître !
Seulement voilà, les derniers ont été les premiers. Les bergers, mais aussi les mages, sont là pour montrer à tout Israël quelle est l’attitude juste en ce jour. Tombant à genoux, ils se prosternèrent devant lui. Nul besoin de discours, nul besoin de dérobade quand Dieu paraît. A genoux devant le Dieu qui nous a faits, car c’est lui notre Dieu et nous le peuple qu’il conduit, le troupeau que mène sa main, chante le psaume 94.
Pour être plus précis, il faut noter que le plus inouï, au sens propre du terme, est ici que cette confession silencieuse de foi au Dieu vivant est faite par des hommes qui, apparemment, en était le plus loin. Des mages, des astrologues de nation et de religion païennes. En eux, chacun peut se reconnaître comme ce dernier que le Christ vient illuminer de son incarnation rédemptrice. En eux, chacun peut se prosterner et adorer le vrai Dieu, le beau Dieu.
Pour finir, je nous laisse deux questions que me suggère l’attitude de ces mages :
Quand nous prosternons-nous ? Notre foi laisse-t-elle place à cette louange gratuite de Dieu, parce qu’il est Dieu ? Au-delà de la prière de demande, de supplique, d’intercession ou encore d’action de grâce, laissons-nous une place à l’adoration gratuite où nous déposons tout au pied de notre Créateur et notre Sauveur ? Le psaume 22 le confesse tout simplement : Dieu, tu es mon Dieu.
Sommes nous des adorants ? Dans nos crèches, il y a des mages qui s’abaissent et s’agenouillent. Il y a des bergers avec des agneaux sur les épaules. Il y a le ravi. 3 figures qui peuvent nous aider en ce jour, en cette Eucharistie, en cette maison du pain, en cette crèche où l’Enfant se présente à nous dans l’hostie consacrée. Nous rendons-nous présents à Celui qui est la présence par excellence ? Serons-nous des adorants ?