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Un homme, une femme

pecheresse.jpgUn homme, une femme. Un hôte, une passante. Un pharisien, une pécheresse. Il avait invité Jésus à la table du festin, pensant honorer le Maître de Galilée, le Rabbi qui interprète la Loi de façon si originale. Elle vient honorer son Maître de la seule manière qu’elle peut, en lui offrant sa foi, celle de la pécheresse qui attend le pardon de Dieu.

Il semble que tout oppose ces deux personnes, contemporains du Christ, héros de la même soirée dans la douceur moite de la maison des hauteurs de Galilée. Les voilà en présence du Christ et c’est comme si cette présence révélait à eux-mêmes le fond de leur cœur.

D’abord, notre Simon le Pharisien. C’est un juif pieux. Il scrute les écritures. Il se met à l’école des maîtres pour connaître la Loi de Moïse et la mettre en pratique. Les Maîtres pharisiens du 1er siècle ont dénombré jusqu’à 613 commandements. Ils encadrent la vie quotidienne. Ils définissent ce qu’il faut manger, comment le cuisine. Ils définissent les rapports sociaux, les relations entre les hommes et les femmes. Ils concernent les manières de prier, de travailler, de s’habiller, de se déplacer. Bref la Loi est un chemin, une nourriture quotidienne qui donne le chemin du salut, le chemin de Dieu.

Rude chemin que celui de Simon. Il lui faudra découvrir que la Loi ne donne pas le salut. Tout au plus, Paul, un autre pharisien, lui enseignera (en difficile du Christ et non en maître de la Loi) que la Loi enseigne ce qu’il faut faire mais ne permet pas de le faire. Seule la foi au Christ sauve. C’est ce que découvre la pécheresse. Regardons-la.

La voici arrivant dans la grande salle, sans se soucier des convenances. Elle se penche, essuie les pieds du Christ avec ses cheveux et son parfum. La foi la pousse. La foi à celui qui peut la pardonner. Parce que si elle est là, dans cette attitude inconvenante, voire scandaleuse, c’est qu’elle attend le salut de Dieu. Son salut, ce sera son pardon. Et le voici, dans une parole : « tes péchés sont pardonnés », et la seconde un peu plus tard : « ta foi t’a sauvé, va en paix ». Ta foi t’a sauvé ! La foi, plutôt que la Loi.

Alors, vous allez me dire : j’ai tout compris. L’important, c’est l’intention, le cœur que nous mettons dans les actes. Nos œuvres, nos rites, nos formalismes, Dieu ne s’en soucie pas. Cela ne lui apporte rien. Et bien non ! Vous n’avez pas encore compris !

Ici, il s’agit d’une discussion théologique qui va traîner tout au long du 1er siècle. Seule la foi au Christ sauve. La Loi de Moïse est impuissante à donner le salut : « personne ne devient juste en pratiquant la Loi » ajoute Saint Paul dans la lecture de ce jour. Les Galates, comme d’autres communautés chrétiennes du bassin méditerranéens comportaient beaucoup de judéo-chrétiens. Ces communautés avaient été tentés de réintégrer des éléments de la Loi juive dans les pratiques chrétiennes et à en faire des préalables pour la conversion des chrétiens issus du paganisme, comme la circoncision ou les pratiques alimentaires. Saint Paul aura des mots durs sur ce qu’il estime être une trahison de l’unicité de la foi au Christ pour donner la grâce.

Une autre discussion aura lieu : la foi ou les œuvres. C’est un autre débat, celui de l’épître de Jacques et surtout de Luther avec les conséquences radicales qu’il en tirera. Finalement, ce qui nous sauve, ce sont nos œuvres ou notre foi ? L’énergie que nous dépensons dans l’activité, caritative ou sociale (dans tous les sens du terme), nos pratiques multiples et variées, ou simplement notre foi exprimée simplement dans la lecture de la Parole ou la prière intime ? Les deux mon général. Ou plutôt les deux en temps qu’elles sont les deux faces d’une même réalité : les œuvres de la foi, la foi qui pousse aux œuvres. Comme un cœur qui vit en permanence ce double mouvement de systole et de diastole.

Je reviens à cet homme et à cette femme. L’homme écoute la Loi et la met en pratique. La femme aime son Seigneur et attend de lui le pardon. L’amour de la femme accomplit l’écoute et l’attente de la femme, parce que la foi accomplit la Loi. Voilà qui devrait nous suffire. L’amour accomplit l’écoute. Accomplit, et donc n’abolit pas. De quel côté sommes-nous ? De celui de l’homme fidèle à son écoute et à son attente, jusqu’à des détails qui nous paraissent scrupuleux ? Du côté de cette femme qui épanche son amour comme elle avait épanché son péché. Les deux, comme David, ont besoin du pardon de Dieu. Retiendrons-nous Dieu de nous l’accorder ?

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