Tu l’as entendu, ô Vierge, tu concevras et enfanteras un fils, non d’un homme - tu l’as entendu - mais de l’Esprit Saint. L’ange, lui, attend ta réponse : il faut qu’il retourne vers celui qui l’a envoyé. Nous attendons nous aussi, ô Notre-Dame. Accablés misérablement par une sentence de condamnation, nous attendons une parole de pitié. Or voici : elle t’est offerte, la rançon de notre salut. Consens : nous sommes libres. Dans le Verbe éternel de Dieu nous avons tous été créés ; mais hélas ! la mort fait son oeuvre en nous. Une brève réponse de toi suffit pour nous recréer, de sorte qu’à la vie nous soyons rappelés…
Ne tarde plus, Vierge Marie, donne ta réponse. O Notre-Dame, prononce-la cette parole que la terre, les enfers, les cieux-mêmes attendent. Vois : le Roi et Seigneur de l’univers, lui qui a désiré ta beauté, désire avec non moins d’ardeur le oui de ta réponse ; à ton consentement il a voulu suspendre le salut du monde. Tu lui as plu par ton silence ; tu lui plairas davantage à présent par ta parole. Voici que lui-même de là-haut t’interpelle « O la plus belle des femmes, fais-moi entendre ta voix » (cf. Ct. 2, 13-14)… Oui, réponds vite à l’ange, ou plutôt, par l’ange au Seigneur. Réponds une parole, et accueille le Verbe ; prononce ta propre parole, et conçois le Verbe divin ; émets une parole passagère, étreins le Verbe éternel !…
Vierge prudente, si ta réserve fut agréable à Dieu dans le silence, plus nécessaire est maintenant l’accord de ta parole. Heureuse Vierge, ouvre ton coeur à la foi, tes lèvres à l’assentiment, ton sein au Créateur. Voici qu’au dehors le désiré des nations frappe à ta porte… Lève-toi, cours, ouvre-lui : lève-toi par la foi, cours par l’empressement à sa volonté, ouvre-lui par ton consentement.
« Voici, dit-elle, la servante du Seigneur ; qu’il me soit fait selon ta parole. »
Saint Bernard (1091-1153)
moine cistercien et docteur de l’Eglise, Homélie 4 sur le ‘Missus est’, 8-9